6.2 *Le vernissage

yves Publié le 24 mai 2007 Mis à jour le 22 novembre 2007 Imprimer cette Page

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En France

Si, selon Thibault Wolversperges, quantité d’artistes tentaient depuis la fin du 17ème siècle de trouver un vernis capable de remplacer ou d’égaler la laque de Chine, il faudra attendre le début du siècle suivant pour que ces différentes recherches débouchent sur des créations d’une qualité jugée satisfaisante. Fort de ces résultats probants, il suffit de penser aux travaux de la dynastie des Martin , l’envie de nouveautés et les contraintes de la mode firent rebondir ces recherches, après 1750, pour des vernis à usages différents, celui destiné à protéger la tôle participant pleinement à ce mouvement.

Ainsi, le « Mercure de France » signale-t-il qu’en 1762 un certain Desforges a inventé un vernis pour recouvrir et protéger les cuivres. Les Archives de la Seine nous apprennent qu’un marchand forain anonyme s’associa en 1771 avec Martin Berneron, peintre vernisseur de carrosses, pour l’exploitation d’un autre vernis ; ce dernier y engouffra toutes ses économies.

Henri René d’Allemagne propose de consulter le « Dictionnaire raisonné universel des Arts et Métiers, ouvrage contenant l’histoire, la description, la police des manufactures de France et des pays étrangers » de l’abbé Pierre Jaubert, paru en pleine effervescence révolutionnaire. On peut y lire un article fort documenté sur l’art de vernir les tôles:

« La peinture sur tôle est un usage très ancien en Turquie… On essaya en Italie, en Angleterre, en France et ailleurs d’imiter ce procédé du Levant. Le premier qui y réussit fut un particulier qui s’établit à Rome il y a près de quarante ans. Les vaisseaux qu’il y vendait étaient recouverts d’un vernis qu’il prétendait être le véritable vernis de Chine, à l’épreuve du feu. Pour le prouver, il mettait ses vases sur des charbons allumés sans qu’ils souffrissent aucun dommage quoiqu’ils s’y échauffassent de manière à pouvoir faire du café. ».

Ces expériences stimulèrent la curiosité des chercheurs et bientôt ils découvrirent que le « vernis d’ambre » appliqué sur un métal quelconque ne s’en détachait pas quelle que fut la chaleur à laquelle l’objet était soumis.

Un « Petit traité des vernis » indique que les produits étaient en général à base de térébenthine et d’esprit de vin dans lesquels on dissolvait par cuisson des résines telles que la sandaraque, le copal, le mastic, la poix grecque, la gomme arabique ou la gomme laque. Cette dernière est secrétée par un insecte vivant sur plusieurs variétés d’arbres des Indes orientales. On la connaît dans le commerce sous le nom de laque en bâtons ; introduite dans l’eau, elle donne au liquide une belle couleur rouge .

Certains vernis transparents furent à base de blanc d’œuf et d’ambre dissous dans l’eau de vie.

On utilisa aussi le bitume, l’huile d’aspic, l’huile de lin.

Ainsi, un « Manuel de vernissage et de laquage » indique que les frères Martin utilisaient du vernis copal avec de l’huile de lin. Par dessus les couches de peinture à la détrempe, venaient autant de couches de vernis…

Le sieur Watin dans « L’art du peintre, doreur, vernisseur » consacre un paragraphe au vernissage des métaux : « Pour vernir une cafetière, un vase de cuivre ou de fer-blanc, polissez d’abord le vase avec une pierre ponce. Prêlez et polissez avec du tripoli. Etendez cinq à six couches de vernis gras au copal si le fond est blanc et au karabé s’il est sombre. Ayant soin de tenir le vase par l’attouchement des mains, attendre que chaque couche soit bien sèche avant que d’en poser une nouvelle. Présentez le vase à une chaleur forte au moment que vous posez le vernis ou si vous le pouvez à la chaleur du soleil : le soleil et le grand air contribuent beaucoup à donner de la dureté au vernis ».

Dans le « Nouveau manuel du fabricant de couleurs et de vernis » de Madame Riffaut (Roret 1862) on trouve un aperçu de quelques unes des nombreuses matières colorantes qui entraient dans la composition des vernis :

le rocou rouge ou jaune rougeâtre ; pâte obtenue à partir des graines du rocouyer que l’ on trouve surtout aux Indes occidentales ;

l’orseille lichen argenté qu’on trouve en Auvergne ;en fonction du produit avec lequel il est mélangé donne des teintes rouge, violet, gris;

le cucuma tige rouge, rouge brun,rouge cramoisi ou jaune;

le safran donne différentes en fonction du mélange ;

le noir de fumée.

En Angleterre

L’encyclopédie Wikipédia, rappelle la faible résistance à l’usage des peintures anciennement utilisées. Les finitions qui existaient alors soit adhéraient médiocrement au support soit requéraient une surface poreuse ou organique pour accrocher.

Le procédé du « japanning » par l’utilisation d’un vernis à l’huile et par la cuisson est attribué à Thomas Allgood. A l’occasion de recherches sur une couche protectrice pour le fer pouvant résister à la corrosion, il mit au point une recette qui contenait de l’asphalte et de l’huile de lin. Une fois appliquée sur le métal et chauffée, cette couche virait au noir et était extrêmement dure et résistante.

Lady Waltson écrit dans la revue « The Connoisseur » d’avril 1931 :

« Une découverte importante pour tous ceux qui s’intéressent aux tôles peintes anciennes a été faite récemment quand, par chance, les formules secrètes qui avaient été perdues depuis une soixantaine d’années furent découvertes dans le journal personnel pour 1864 du père de W.H.V Bythway par ses descendants. Ces formules furent à n’en pas douter placées là dans le souci de les mettre en sécurité et lorsque ce journal annuel fut remplacé par un nouveau, il fut sans doute perdu de vue et oublié.

Il sera intéressant dans l’avenir de voir d’une part quel usage sera fait de ces recettes qui, selon les spécialistes, contiennent sept ingrédients et dix-sept autres en moindre proportion et d’autre part si cette industrie, qui cessa ses activités en 1864, pourra être relancée. Pour plus de détails, on peut consulter la « Free Press of Monmoutshire » du 15 octobre 1928 ».

.D John dans « Pontypool japan » donne une des recettes de « vernis secrets » transmises de génération en génération, recette probablement élaborée antérieurement à son utilisation pour le « japanning » sur métal:

448 livres d’huile de lin vierge

22 livres d’ambre ou succin

20 livres de litharge

100 livres d’asphalte ou bitume de Judé

5 livres de résine de cobalt

406 livres d’essence ou de térébenthine.

L’huile de lin était chauffée avec l’ambre et l’asphalte alors que la litharge et le cobalt étaient ajoutés lentement. Après refroidissement, la térébenthine était ajoutée. Il existait aussi une « version claire » qui omettait l’asphalte et le cobalt. Cette recette présente une remarquable similitude avec celle pour le vernis doré publiée par Robert Dossie ,1764 et Stalker et Parker, 1688. Dans cette version, l’huile de lin est chauffée avec de la gomme animé, de l’asphalte, de la litharge et de l’ambre dans les mêmes proportions, approximativement, que la recette de Pontypool.

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