4.5 °Enseignes, objets de piété

yves Publié le 19 février 2008 Mis à jour le 1 janvier 2009

______________

Enseignes et girouettes

Par la nature même du matériau, on conçoit que la tôle peinte ait été largement utilisée pour fabriquer des enseignes qui, suspendues à des pièces de ferronnerie, signalaient, à l’attention des chalands potentiels, les échoppes des artisans et des commerçants.

Mais, exposées en permanence aux intempéries, ces enseignes ne pouvaient que s’écailler et rouiller. Elles sont donc rares sur le marché de l’art populaire et, malheureusement, souvent dégradées.

On en trouvera cependant, ci-dessous, quelques exemples: cf n° 50, 51, 52, 53, 69.

Les girouettes sont, peut-être, encore plus malaisées à trouver: cf n° 54.

Objets de piété

N’étant utilisées qu’à l’occasion des événements liturgiques ou des quêtes, les enseignes de procession, qu’on tenait à la main ou au bout d’une hampe, nous sont parvenues en meilleur état de conservation : cf n° 55, 56, 57.

Lors des processions nocturnes, il fallait, bien sûr, s’éclairer en chemin. On utilisait donc des lanternes, dites « de procession ». Les plus beaux spécimens sont souvent d’origine italienne : cf n° 58, 91. Les pique cierges cf n° 67 étaient naturellement de rigueur.

La tôle peinte, naturellement moins périssable qu’un bouquet de fleurs, a été utilisée pour l’ornement des églises. On trouve ainsi de jolis bouquets d’autel polychromes : cf n° 59.

Dans les régions vinicoles, il était courant, dans les chais, de placer sur les futailles une « plaque de vigneron » : cf n° 60.

Enfin, on conçoit que la tôle ait pu être utilisée pour les ex-voto.

 

_______________________________________________________________________________________________________________________________

 

 

Enseigne de chapelier Directoire.JPG

Enseigne de chapelier n°1

 

 

50

Enseigne de chapelier, en tôle peinte rouge à large liseré ocre, ruban perlé portant une cocarde bleu, blanc, rouge. Epoque Directoire.

Coll. Cazenave

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Enseigne de chapelier.JPG

Enseigne de chapelier n°2

 

 

51

Enseigne de chapelier en tôle peinte rose, un ruban à nœud noir. Circa 1830.

Coll. Cazenave

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Carnavalet 4.JPG

Enseigne de chapelier n°3

 

 

52

Enseigne de chapelier, en tôle peinte rouge, en forme de bicorne, large liseré doré à motif de feuilles de chêne, ruban perlé. Epoque début 19ème.

Musée Carnavalet.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Enseigne de pompiers.JPG

Enseigne de corps de pompiers

 

53

Enseigne de corps de pompiers, en forme de hache de couleur verte bleutée, une tête de lion au milieu du manche. Epoque Restauration.

Coll. Cazenave

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Gabriel Weather Vane.jpg

 

 

54

Girouette, travail américain, représentant l’ange Gabriel, ornant à l’origine la tour de l’église universaliste de Newburyport dans le Massachusetts. L’ange est un sujet bien moins répandu que les chevaux ou les coqs, par exemple, et l’image de l’ange Gabriel encore plus rare. Même si l’on connaît plusieurs exemples de l’archange soufflant dans une trompette, cette version semble unique en son genre. Fabriqué en 1840 par la Gould and Hazlett Company à Boston, cet ange présente un corps plat, découpé dans de la tôle, et doré. La trompette cylindrique est en cuivre. Les pièces sont fixées entre elles par des rivets de fer. Les contours ondoyants des ailes et de la robe de l’ange donnent une certaine grâce à ce travail qui reste de facture peu raffinée si l’on en juge par les lourds supports qui tiennent la silhouette. L’ artiste, Lucille Chabot, dut procéder à des essais pour parvenir à une technique permettant de « donner à la pièce un aspect brillant ….non de lui donner un aspect grenu ». Elle obtint l’effet désiré par « une série de couches de couleur appliquées successivement l’une sur l’autre».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ensigne de procession 1.JPG

Enseigne de procession n°1

 

 

55

Enseigne de procession en tôle peinte, de forme ovale, représentant la Vierge, la tête gracieusement inclinée, tenant en son bras droit l’enfant Jésus, au dessus d’un croissant de lune, entourée de nuées. Epoque 18ème.

Coll. Cazenave

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

P1000138.JPG

Enseigne de procession n°2

 

 

56

Enseigne de procession en tôle peinte à fond rouge, de forme ovale surmontée d’une couronne stylisée. Deux anges, l’un en robe rouge, l’autre en robe bleue, priant, les mains jointes, sous le cœur sacré de Jésus irradié de rais de lumière. Epoque 18ème.

Coll. Cazenave

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Enseigne de quête.JPG

Enseigne de quête publique

 

 

57

Enseigne de quête publique, en tôle peinte polychrome, portant l’inscription : « L’œuvre des prisons ». Epoque fin 18ème.

Coll. Cazenave

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Lanterne de procession italienne.JPG

Lanterne de procession

 

 

58

Lanterne de procession en tôle peinte bleue, à vitre, large liseré ocre, sur une hampe en bois tourné, deux bougeoirs et un porte cierge conique. Travail probablement italien. Epoque fin 18ème. Coll. Cazenav

 

 

 

 

 

 

 

 

 

P1000141.JPG

Bouquet d’autel

 

 

59

Bouquet d’autel en tôle peinte polychrome, sur un socle représentant un vase à deux anses. Epoque Directoire.

Coll. Cazenave

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Plaque de chais.JPG

Ecusson de chais

 

 

60

Ecusson de chais, en tôle peinte polychrome à fond bleu pâle, découpe en partie inférieure en forme de grappes de raisin, représentant le Saint patron des vignerons. Epoque 18ème.

Coll. Cazenave

 

 

 

 

 

 

 

Pique-cierges.JPG

Pique cierge

67

Ensemble de huit pique cierges en bois et tôle peinte polychrome, ornés de scènes religieuses en médaillon. Ancien travail vraisemblablement alsacien. H totale : 47 cm ; Dimension d’un médaillon : H 27,5 cm ; L 23 cm.

Vente Etude Alain Briscardieu, Bordeaux, 29/03/2008 ; n° 64 du catalogue.

 

 

 

 

 

 

 

Enseigne de perruquier.JPG

Enseigne de perruquier

 

69

Enseigne de perruquier. Une perruque à marteaux posée sur un support est peinte en blanc et noir sur une tôle rectangulaire bordée de rouge dont les bords sont abattus. Travail anonyme d’époque 18ème siècle. Dimensions 53 cm x 43 cm. Musée Carnavalet.

 

 

 

 

 

 

91 Lanterne de procession Mouret Aix en Provence.jpg91 Lanterne  Marque de  Mouret Aix en Provence.jpg

Lanterne de procession

91

 

Lanterne de procession en tôle peinte à fond crème et filets dorés, en forme de tronc de pyramide hexagonale à pans galbés, le sommet architecturé en forme de deux gradins à rambardes ajourées, deux fenêtres circulaires crénelées et vitrées sur chaque pan, la prise de hampe simulant des feuillages. Elle porte la marque : « MOVRET AIX EN PROVENCE ».  Epoque fin 18ème siècle.

Commerce d’art parisien ; Marché Serpette.

 

 

 

 

 

Mots-clés: ,

4.4 °Accessoires de mobilier

yves Publié le 23 novembre 2007 Mis à jour le 1 juin 2009

________

L’usage de panneaux de tôle vernie dans le meuble français au 18ème siècle

 

Dans son ouvrage « Le meuble français en laque au 18ème siècle », Thibault Wolversperges donne de précieux renseignements sur l’utilisation de panneaux de tôle vernie dans le mobilier.

 

Jean-Baptiste Clément, vernisseur de la Manufacture de la petite Pologne, inséra dans les gazettes parisiennes plusieurs annonces vantant les mérites de son établissement.

Ainsi, le Mercure de France de mai 1770 cite, parmi les différentes marchandises de tôle vernie que celle-ci avait déjà réalisées, l’existence de « commodes et autres meubles ».A la même époque, un encart des Petites Affiches de Paris stipule, le 17 mai, qu’en raison du mécontentement causé par leur représentant Framery, marchand mercier, le même Clément priait les clients de lui adresser directement leur commande à la manufacture « où l’on fera des commodes, cabinets, chiffonnières et autres meubles dans le goût de la Chine ».

 

D’autre part, si la Manufacture royale de vernis sur tôle de la veuve Gosse et Samousseau n’inséra aucun encart publicitaire révélant la création de meubles en tôle, un état des marchandises, dressé en 1776, mentionne l’exceptionnelle présence, parmi plus de onze cent pièces manufacturées, de trois meubles en tôle vernie, soit deux armoires et une encoignure « vernies et japonnées ».

 

Dès lors, si certains meubles des ébénistes Macret et Lutz datant des années 1770 présentent de tels panneaux, il apparaît extrêmement difficile, voire même impossible, de déterminer avec certitude de quelle manufacture ces panneaux étaient issus, aucun relevé de débiteurs de ces deux sociétés n’ayant pu être retrouvé. Même si la Manufacture de la Petite Pologne précisa qu’elle confiait une partie des ventes de ses marchandises au marchand Framery, puis à Dulac, les données relatives à ces deux marchands n’aident aucunement pour déterminer la paternité de ces meubles. Il en va de même des deux ébénistes précités, qui estampillèrent trois commodes et une encoignure dont les vantaux sont recouverts de plaques de tôle à décors japonais. Réalisé entre 1765 et 1775, cet ensemble unique présente une telle unicité qu’il serait tentant de penser qu’il avait plutôt été réalisé sous les ordres de Pierre Macret, ébéniste et marchand mercier installé rue Saint Honoré, devenu fournisseur des Menus Plaisirs du Roi dès 1764, et que celui-ci dût sous-traiter avec l’ébéniste Lutz, trop récemment admis à la maîtrise pour pouvoir concevoir seul un tel meuble.

 

Comme l’annonçait la Manufacture de la Petite Pologne, les clients pouvaient adresser leurs commandes particulières directement à la manufacture; elle offrait également la possibilité d’en procurer soi-même le modèle. Par le fait qu’aucun marbre, ni même aucune garniture de bronze doré, n’ont pu être retrouvés dans les locaux de ces deux manufactures, il apparaît plus que probable que l’une comme l’autre ne les réalisait qu’à la commande émanant vraisemblablement d’un marchand.

 

Cette série de meubles, véritablement unique dans l’histoire du mobilier en laque, témoigne d’une simplicité de construction édifiante, les panneaux en tôle, parfaitement adaptés aux dimensions des meubles, étant simplement fixés par des encadrements et des baguettes de bronze doré, ou par un retour de tôle vissé dans le bâti. Ils sont également les seuls à présenter l’entièreté du meuble plaquée de tôle, excepté, évidemment, la structure portante décorée en vernis Martin, ce qui témoigne d’une commande bien particulière, contrairement aux meubles de pur style Louis XVI, se contentant d’enchâsser comme des tableaux leurs panneaux de tôle qui deviennent, de ce fait, indépendants de la structure du meuble et qui pouvaient facilement être remplacés par tout autre matériau.

 

Si la commode à fond noir de  Lutz a pu être rapprochée d’une description d’une commode en tôle réalisée entre 1771 et 1778 pour la Marquise de Beringhen, il apparaît que des meubles en tôle furent conçus à Paris bien avant la création de ces deux manufactures. Ainsi la Princesse d’Anhalt-Zerbst, « dame et grande impériale de Catherine de Russie », possède, en 1760, dans son cabinet sis dans l’Hôtel Vendôme, rue d’Enfer, une « fausse commode de tôle à jour à dessus de marbre», qui, comme l’apprend son inventaire après décès, imitait et accompagnait une commode de laque à trois tiroirs de même dimension, soit 90 cm de large. Malheureusement, aucun renseignement n’a pu être retrouvé à ce jour dans les archives parisiennes concernant ce genre de travaux avant la création des deux manufactures précitées.

 

Si les deux manufactures de vernis connurent de sérieux problèmes, que ce soit dans la gestion journalière, la situation des actionnaires mais surtout la vente de leurs produits, ceux-ci ne rencontrant qu’un accueil des plus mitigés du public, la situation catastrophique de la Manufacture de la Petite Pologne entraîna, en 1771, la fuite de plusieurs ouvriers qui purent, par la suite, travailler de manière indépendante. Comme l’annonçait Granchez en octobre 1771, deux anciens ouvriers de cette entreprise oeuvraient alors pour lui. Aussi, il ne faut pas s’étonner de retrouver la veuve Clément, ancienne vernisseuse de la manufacture, réclamant, en 1784, le paiement de son salaire par Granchez.

 

Les autres ouvriers, dont plusieurs vernisseurs ou « japonneurs », purent également travailler pour des marchands, que ce soit pour Daguerre ou Delaroue, ce dernier ayant fourni au Comte d’Artois une table à écrire dont  la ceinture présente « dix médaillons en tôle couleur de lapis, vernis avec des figures dansantes dans le genre des camées antiques ».

Deux guéridons quadripodes sont également ornés de plaques de tôle vernie imitant la porcelaine. Par leur simplicité et une garniture de bronze doré limitée au strict minimum, ils ne peuvent guère être perçus comme concurrents des tables dotées de plaques de porcelaine, mais simplement comme une imitation à meilleur marché destinée à une clientèle différente. Le premier guéridon, le plus luxueux, est orné sur sa ceinture de quatre plaques rectangulaires imitant un décor de porcelaine et doté d’un plateau également de tôle, reprenant les thèmes des pastorales à la manière de Teniers. Le second, sommé d’un marbre blanc, présente sur la ceinture quatre plaques à fond blanc décorées de grappes de fruits. Identiques d’un point de vue mesure et structure en bois d’amarante et de rose, seule leur garniture de bronze doré diffère. Difficilement attribuables au travail d’un marchand mercier bien déterminé, ils sont un bon témoignage d’une production de meubles moins onéreux incorporant des panneaux de tôle.

 

Si le marchand Granchez passa une annonce dans le Mercure de France vantant les mérites des objets en tôle vernie de sa fabrique de Clignancourt, il y précisa pour les différentes garnitures de cheminée qu’elles sont « très perfectionnées pour les peintures, tant à sujets qu’à fruits & fleurs, imitant les plus belles porcelaines ». D’ailleurs, certains objets portant la marque de cette manufacture présentent un décor dans le même esprit que les plaques à décor de fruits ornant la table décrite ci-dessus. Il faut cependant noter que les plaques de tôle à l’imitation de la porcelaine ne furent pas le monopole de Granchez. Ainsi, Daguerre, livrant un bureau plat de Carlin doté de plaques de porcelaine de Sèvres, l’accompagna d’une armoire « à portes de chaque côté pour mettre au bout dudit bureau, elle est plaquée en bois de rose, & ornée de plusieurs panneaux de taule peints et vernis à l’imitation de la porcelaine ».

 

D’autres marchands merciers firent aussi réaliser des meubles en tôle moins luxueux, par simple montage de plateaux sur un piètement conçu à cet effet. Ainsi, le marchand mercier Dubuisson se spécialisa dans l’arrangement de table à plateau de tôle vernie d’Angleterre. Ces guéridons furent réalisés par l’ébéniste Canabas, à qui il paya le 24 décembre 1767, 29 livres pour « un pied (à tige) en bois d’acajou a crémaillère et tournant pour un platteau de tole d’Angleterre vernis »., qu’il revendit six jours plus tard pour 72 livres. Ce même marchand avait déjà livré une table de ce genre, en septembre 1767, et une autre, l’année suivante. De telles tables, toujours en tôle anglaise, se retrouvent également chez Madame Blakey, installée rue des Prouvaires  « Au magasin Anglais ». Daguerre, semble-t-il, a également vendu des guéridons où s’encastrent des plateaux de tôle vernie d’Angleterre.

 

L’ouvrage d’Alain Renner, intitulé « Mobilier de métal de l’Ancien Régime à la Restauration » consacre au chapitre III, un intéressant paragraphe au « Mobilier en tôle peinte », pages 120 à 129.

 

Plusieurs pièces de mobilier exceptionnelles y sont décrites.

 

La première, assez rare, est la commode à ressaut citée plus haut, coiffée d’un marbre brèche violette des Pyrénées, ouvrant en façade par deux vantaux marquetés intérieurement et découvrant une étagère. Si l’ébéniste Gérard Henri Lutz, reçu maître en 1776, en fit le bâti, le reste du travail fut exécuté par un peintre vernisseur de la manufacture Samousseau.

Les deux portes, en tôle laquée à fond noir avec rehauts d’or, sont ornées d’éventails présentant des paysages animés de pêcheurs dans le goût chinois. Encadrements, montants et pieds sont rehaussés par des quadrillages feuillagés, à l’imitation de la marqueterie dite « à la Reine ».

Cette commode est probablement celle décrite ainsi: « Une commode en taule peinte sur fond de laque garnie de fonte dorée… »,  au n° 109 de l’inventaire après décès de la Marquise de Berhinghen, dans le petit cabinet l’Hôtel de Sens.

 

Les meubles ornés de plaques de tôle sont extrêmement rares et bien peu sont parvenus jusqu’à nous.

 

Un ensemble de trois meubles, estampillé Macret, portant un décor similaire et des bronzes identiques, présente,

à l’instar de la commode de Lutz, la caractéristique d’être entièrement recouverts de plaques de tôles alors qu’en général sur les autres meubles connus, ces plaques sont utilisées comme éléments décoratifs, remplaçant les plaques de porcelaine ou les panneaux de laque d’Extrême Orient :   

 

-une commode, à plateau de marbre blanc veiné, donnée en 1965 par la Fondation Florence Goult et conservée

 au château de Versailles, dans les appartements du Petit Trianon.

 Elle porte deux marques, non identifiées, surmontées d’une couronne : DFT et GRC, ainsi que la marque du fer

 du Garde-robe de Marie-Antoinette, alors Dauphine.

 Elle est ornée de plaques de tôle laquée, à l’imitation de l’aventurine, sur les deux portes et sur les côtés.

 Chaque panneau est orné de réserves chantournées, à décor noir et or de paysages animés avec pagodes sur un

 fond rouge vermillon.

 

-une commode, identique à celle de Versailles, vendue aux enchères, par Me Loiseau et Schmit, à Saint Germain

 en Laye, le 30 juin 1985.

 

-une encoignure, portant elle aussi les marques DFT et GRC, vendue aux enchères à Paris par Me Audap,  le 23

   mars 1984 (lot 101).

 

Parmi les meubles ornés de plaques de tôle laquée, on peut citer deux bureaux à cylindre estampillés de Claude-Charles Saunier et un de R.V.L.C (Roger Vandercruse dit Lacroix).

 

La tôle, a parfois été utilisée, dans un but pratique plus qu’esthétique, comme doublure pour des tiroirs ou des armoires dont on voulait faire un coffre-fort. Le « Livre journal » de Lazare Duvaux mentionne à plusieurs reprises deux secrétaires de ce type. La tôle a aussi pu être plaquée d’argent, voire remplacée par du cuivre argenté, pour décorer de petites tables ou former des caissons de tables-servantes ou de jardinières.

 

La tôle fut aussi utilisée pour des ornementations imitant les plaques de porcelaine de Sèvres mises à la mode par Martin Carlin.

 

Un exemple remarquable est une exquise table écritoire ovale, estampillée Jacques-Laurent Cosson reçu maître en 1765, probablement créee par le marchand mercier Granchez qui employait d’anciens ouvriers de la manufacture de la « Petite Pologne ».

Le plateau est orné d’un panier de fleurs posé sur un rocher à côté de fruits négligemment posés, bien dans le goût du retour au naturel de Marie-Antoinette, La ceinture est ornée de plaques de tôle décorées de guirlandes de fleurs sur fond blanc.

 

Un autre exemple notable est celui d’une petite table ovale à deux plateaux, conservée à la Villa Ephrussi de Rotschild à Saint-Jean Cap Ferrat,  estampillée de Cramer, ébéniste germanique reçu maître en 1771.

Le plateau supérieur, bordé d’une galerie de bronze, est recouvert d’une paque d’étain rehaussé de gouache, or et argent, portant l’inscription « Vue du Palais Royal prise du fond du jardin, exécutée sur le tour par Compignié, Tabletier du Roy ». Cette vue est remarquable par la précision du dessin d’architecture, encadré par des rinceaux bordés de perles, dans de délicats coloris de rose, vert et doré, l’ensemble sur fond vert à décor de rais jonchés de fleurs.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Quelques exemples de mobilier faisant usage de la tôle peinte

 

On peut citer :

 

-chaises, en général en bois fruitier, à dossier orné d’un panneau de tôle peinte 61;

-dais 62 ;

-guéridon 63 ;

-table de chevet 64 ;

-table à thé ;

-table de salon (travail allemand de Stobwasser) 101;

-buffet deux corps (travail anglais) 106

__________________________________________________________________________________________

 

Chaise n°2.JPGChaise n°1.JPGChaise n°3.JPGChaise n°4.JPG

Chaise n°4 Détail.JPGChaise n°1 Détail.JPGChaise n°3 Détail.JPGChaise n°2 Détail.JPG

Suite de quatre chaises

 

61 Suite de quatre chaises en noyer, le dossier orné d’un panneau en tôle peinte présentant une scène intitulée « La parade militaire ». Epoque Empire.

Coll. Cazenave

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ciel de lit Serpette 01 12 2007.JPG

Dais

 

 

62

Dais ou ciel de lit en tôle peinte bleu pâle, à six branches incurvées se rejoignant au sommet sur un bouquet de feuilles dorées, la couronne, munie de crochets, ornée de losanges bleu foncé, ornementation de fleurs stylisées dorées. Epoque début 19ème siècle.

Commerce d’art. Marché Serpette. 2008.

 

 

 

 

 

 

 

Guéridon 1770.JPGGuéridon 1770 bis.JPG

Guéridon/p>

 

 

63

Guéridon en acajou, plaques de tôle peinte sur le plateau et en ceinture, à l’imitation de la porcelaine, vers 1770.

Cité par Thibault Wolversperges dans « Le meuble français en laque du 18ème siècle ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

P1000169.JPG

Table de chevet

 

64

Table de chevet en tôle peinte à l’imitation du bois, un tiroir en partie haute, ouvrant à une porte. Première partie du 19ème siècle.

Coll Cazenave

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

P1000265.JPG Table de salon plateau.jpgTable de salon détail.jpg

Table de salon de Stobwasser

101

 

Rare table de salon en tôle laquée noire. Elle présente un plateau ovale orné au centre d’une perruche burgautée, reposant sur un rinceau fleuri et feuillagé. La ceinture est ornée de cartouches à fond crème à décor de fleurs dans un encadrement doré. Elle présente un tiroir latéral en ceinture. Montants et pieds cambrés, réunis par une entretoise rognon, laquée d’un bouquet de fleurs. Chutes et sabots de bronze ciselé et doré, feuillagés.

Attribuée à Stobwasser   Braunschweig.

Allemagne (?)  circa 1780.

H : 72 cm ; L : 55,5 cm ; P : 39 cm.

Estimation 20000 € - 25000 €.

 

Cette table d’une très grande qualité est caractéristique des productions de Stobwasser Braunschweig (1740 – 1825), ce dernier ayant développé la technique du décor peint sur tôle et nacre. Il fut sous  la protection du duc de Brunswick. Son atelier employait en 1796 jusqu’à quatre-vingts artisans.

Une table extrêmement proche est illustrée dans l’ouvrage de G.Himmelherber : « Die kunst des deutschen mobels », volume III Munich 1973, illustration n°79.       

 

Lot n° 148 ; Vente Piasa 10 décembre 2008

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

106 Cabinet deux corps en acajou George III.jpg106 Cabinet deux corps George III détail.jpg

Cabinet deux corps George III

106

 

Rare cabinet anglais en acajou, à deux corps, à panneaux de tôle peinte. Epoque Gorge III, circa 1800.

Le corps supérieur présente une corniche plane au dessus de deux portes, chacune à double panneau de tôle polychrome, l’un rectangulaire et l’autre ovale.

Les panneaux rectangulaires représentent respectivement l’un une scène de village  animée d’un joueur de cornemuse et d’une jeune fille  assise prés d’un bouquet de fleurs devant un cottage, l’autre une scène similaire avec un couple  de danseurs.

Les panneaux ovales représentent l’un une femme  tenant une ancre personnifiant  l’Espoir et l’autre une femme entre les plateaux d’une  balance symbolisant la Justice.

Le corps inférieur présente un tiroir en ceinture à  écritoire coulissant, surmontant un buffet ouvrant  à deux portes à panneaux de tôle polychrome décorés tous deux de couples d’amoureux dans un décor champêtre. Il repose sur des pieds  légèrement inclinés.

H : 1645,1 cm ; L : 81,3 cm ; P : 53,3 cm.

Vente Sotheby’s New York 24 avril 2008; Collection Tom Devenish ; lot  n° 168.

Estimation : $ 400000-60000.

Provenance Sotheby’s Londres,, 26 septembre 1997, lot n° 208.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mots-clés: ,

3.2.2 °Manufactures américaines

yves Publié le 1 novembre 2007 Mis à jour le 1 novembre 2007

_______________

Les manufactures anglaises, notamment de Pontypoll et Usk, exportèrent leurs productions aux Etats-Unis.

Une manufacture, peut être la plus connue, s’établit à Steven Plains, dans l’état du Maine, vers 1798-1800 grâce à l’esprit d’entreprise de Zachariah Brackett Stevens. A l’époque, il existait déjà des ferblanteries dans le Connecticut.

Esther Stevens Brazer nous apprend que son arrière arrière grand-père Zachariah était apparemment apprenti chez Paul Revere ,héros de l’indépendance américaine, qui passe pour avoir possédé une manufacture de « japanware » vers le milieu du 18ème siècle. Elle était gérée par un anglais, un certain Brisco, qui enseignait l’art du « japanning ».

C’est fort probable, car comment Zachariah, né et issu d’un milieu paysan, aurait-il pu atteindre autrement le haut degré de perfection qui se manifeste dans ses productions ? Ces dernières portent la marque du style anglais, avec des décors représentant essentiellement des fleurs ou de petits fruits, même si l’on en connaît certains comportant des paysages.

Peu après, Brisco s’installa à Stevens Plains, ce qui accrédite l’idée que Zachariah l’avait connu auparavant, peut-être chez Revere. Il emmena avec lui sa femme et ses cinq nièces adoptives qui étaient les sœurs de Francis.

Leur oncle leur avait, bien sûr, parlé de ses talents et elles travaillèrent à la fabrique de Stevens Plains où elles décorèrent de nombreuses pièces. Sally, l’une d’entre elles, était réputée pour ses décors de roses, et l’on dit qu’après son mariage, elle continua à peindre ce motif favori sur divers supports tels que portes, chaises et tables.

Durant tout ce temps, les fabricants de « japanning » du Connecticut furent attirés par Stevens Plains et un certain Goodrich y installa une manufacture. Ils amenèrent avec eux la technique du Connecticut qui s’inspirait naturellement de l’art populaire allemand, suisse et bavarois dans la mesure où beaucoup d’entre eux venaient de l’ancien monde.

Deux écoles fleurirent ainsi côte à côte et se mélangèrent parfois. Les couleurs utilisées par l’école du Connecticut, comme on peut s’y attendre, étaient souvent le rouge, le vert ou le jaune vifs rehaussés de noir. Parfois on rencontre une surprenante bande blanche ourlant le couvercle d’un coffret, un plateau ou une boîte à thé. Elle forme une sorte de liseret mettant en valeur le décor de fruits, de feuilles et parfois de fleurs placé à l’intérieur.

Sur les pièces les plus simples, les tiges, les fleurs et les feuilles étaient composées à coups de pinceau artistiquement appliqués. Cette technique demandait des années d’apprentissage et constitue la marque d’un artisan accompli.

A Stevens Plains, Zachariah fournissait des modèles à ses employés, mais il travaillait souvent lui même sur fond blanc pour les pièces dites de « mariage » dont beaucoup étaient décorées de bouquets, parfois rehaussés de filets dorés. D’autres fois, il utilisait le doré sur fond blanc. Il utilisa aussi le jaune pour les fonds. Ses fleurs présentent la caractéristique d’être nimbées d’une touche de blanc.

Il y a quelques années, Maud Pastor, qui possède une splendide collection de tôle peinte, vint nous rendre visite à Chicago pour voir notre propre collection. Quand elle retourna dans l’Ohio, elle m’envoya une reproduction sur papier d’un plateau décoré par Zachariah qui avait été peinte par son arrière arrière grand-mère, Esther Steven Brazer, et signée par elle. J’ai beaucoup apprécié ce trésor !

Une autre manufacture importante était celle de Aaron Butler. Elle était implantée à Brandy Hill, dans l’état de New York près de Catskills. Il enseigna son art à ses filles, Ann, Marella et Minerva, qui décorèrent beaucoup de ses pièces.

Ann, évidemment la plus âgée, signait ses œuvres « Ann Butler » à l’intérieur d’un cœur, tant il est vrai qu’elle mettait du coeur à ses travaux. Elle adorait cela. Plus tard, elle se maria à un riche fermier, partit loin de la maison familiale et passa dorénavant sa vie à la ferme. On peut espérer qu’elle emmena ses précieuses boîtes de peinture et qu’elle utilisa son talent pour décorer son propre intérieur.

J’ai vu plusieurs pièces produites par Butler, avec des décors d’oiseaux et de cœurs, mais aucune n’était signée

Je possède une boîte à documents ornée d’une guirlande, bordée d’un délicat pointillé et agrémentée de glands, mais sans signature. Je l’utilise quotidiennement pour y garder du pain aux raisins et chaque jour ravive ainsi le plaisir que me procure cette pièce.

Alors que Zacharia fournissait lui même des modèles à ses employés de Stevens Plains, Pontypool et Usk employaient des artistes de talent pour améliorer la beauté de leurs productions. Le style classique était naturellement le plus demandé.

Ecrire sur les manufactures de tôle peinte et négliger la production de Pennsylvanie, serait impardonnable ! Depuis plusieurs années, des ouvrages de référence ont amplement contribué à la connaissance de ces objets.. Certains affirment qu’une production exista à Philadelphie, ce qui est bien possible.En tous cas, elle était appréciée dans toute la Pennsylvanie.

Qu’il n’y ait pas eu de production à Lancaster ou dans ses environs est aussi possible. Mon sentiment personnel est qu’une partie du fer blanc provenait de ces régions. Je ne veux pas dire qu’une production commerciale y ait été développée, bien que le travail du fer blanc y soit attesté par des pièces martelées aux alentours.

Des artisans, capables de découper un pot en métal et de le décorer habilement par martelage, étaient certainement aussi à même de faire des découpages moins élaborés. Si des coffres de mariage, des chaises et des tables étaient décorés ici, pourquoi exclure l’éventualité que des amateurs aient aussi décoré des cafetières, des corbeilles à pain ou à fruits, des plateaux ou tous ces objets qui faisaient fureur.

Bien sûr, une autre possibilité est que, durant la conquête de l’Ouest, nombre d’artisans de la Nouvelle Angleterre, qui travaillaient la tôle, aient quitté leur lieu de naissance pour l’aventure

Pour gagner leur vie, ils peuvent s’être arrêtés dans plusieurs villages prospères de Pennsylvanie, s’y être installés avec leurs outils et avoir produit des pièces propres à séduire les maîtresses de maison.

Ces pièces peuvent avoir été acquises par paire, une pour la cuisine et une pour la décoration. Si cela s’est produit plusieurs fois, dans plusieurs villages, et par de nombreux artisans, de nombreuses pièces décorées devraient avoir survécu, peintes dans les brillantes couleurs prisées par les Pennsylvaniens : bleus vifs, rouges rosés, verts dégradés, et jaunes souvent accentués de noir.

Il est aussi possible que ces hommes aient payé leur nourriture et leurs vêtements en vendant leurs talents, car quelle maîtresse de maison éprise de beauté aurait-elle pu résister à ces charmants objets. Et de plus, à supposer qu’ils aient appartenu à l’école du Connecticut, leur technique de l’art populaire ne pouvait qu’attirer des gens ayant les mêmes racines.

De nombreuses et sérieuses recherches sont menées dans cette direction. Cette énigme trouvera un jour sa réponse, comme il en a été pour d’autres de même difficulté.

________________

.

Mots-clés: ,

3.2.1 °Manufactures anglaises

yves Publié le 1 novembre 2007 Mis à jour le 1 novembre 2007

________

Pontypool

Les premières expérimentations de « japanning » sur du fer-blanc furent menées à Pontypool.

Cette ville, tournée vers l’industrie du fer dès sa fondation, fut aussi la première à utiliser un procédé de production d’étain en feuilles.

Des expérimentations y furent menées sur différentes méthodes de finition du métal qui conduisirent à la production de pièces de vaisselle en étain dites « japanned ».

Le « japanning » appliqué au fer-blanc

Quand John Hanbury reprit les affaires familiales en 1685, il était le premier de la famille à s’installer à Pontypool, ce qu’il fit pour gérer les activités dans le domaine du fer. Il rassembla autour de lui un groupe de producteurs expérimentés et sa manufacture commença vite à produire des quantités significatives d’articles en fer qui étaient de qualité supérieure.

Un de ses gérants, nommé Thomas Allgood, fut amené à mener de nombreux essais pour tester la qualité du fer produit. C’est durant ces essais qu’il découvrit une matière qui pouvait être utilisée pour recouvrir le métal et qui, chauffée à bonne température, créait en surface une couche laquée, brillante et dure. Sa priorité allant à la gestion, il ne se soucia pas de voir comment sa découverte pouvait être utilisée.

Il mourut en 1716 et son fils Edward prit sa place. Avec son frère John, c’est lui qui allait exploiter la découverte de son père. C’est en 1732, quand Charles Hanbury se retira des affaires, que la première production à petite échelle de « japanware » commença en Angleterre.

Le procédé de fabrication

La famille Allgood s’attacha à conserver le secret du procédé. Ce qui suit en donne une idée raisonnable mais qui ne peut être tenue pour certaine :

1 Les barres de fer étaient d’abord transformées en feuilles par des rouleaux.

2 Les feuilles de tôle ainsi obtenues étaient nettoyées et plongées dans un bain d’étain en fusion, ce qui déposait

une fine couche résistante à la rouille.

3 Elles étaient ensuite plongées dans un bain de céréales fermentées qui agissait comme un acide.

Cela les nettoyait suffisamment pour être aptes à recevoir un décor.

4 Les feuilles étaient alors coupées en bandes ce qui autorisait leur mise en forme.

On ne connaît pas les outils qui étaient utilisés pour cette mise en forme, mais il est possible qu’ils aient été

Assez semblables à ceux des artisans qui travaillent l’argent aujourd’hui.

5 On appliquait une couche d’un vernis composé d’une mixture d’huile, d’une substance verdâtre et d’une sorte

de poudre de charbon) et l’objet était introduit dans une étuve qui transformait le vernis en une surface noire,

dure et brillante.

6 La pièce était alors décorée.

Un fini rappelant l’écaille de tortue était parfois appliqué avant la décoration.

7 On passait alors plusieurs couches de vernis.

8 La pièce était à nouveau passée à l’étuve, ce qui achevait de lui donner une surface très résistante.

La famille Allgoods

Les Allgoods installèrent leur activité dans un petit cottage à Trosnant. Au début, les pièces produites étaient

de petits objets à usage domestique tels des bougeoirs, des plateaux pour le thé, des assiettes à beurre et des boîtes à poudre. Ils étaient décorés à l’imitation de l’écaille de tortue avec des paysages chinois, des personnages

ou des motifs floraux.

L’activité ne tarda pas à prendre de l’ampleur. Des clients commencèrent à passer commande de pièces spéciales : tabatières, plateaux ornés de portraits de membres de la famille ou de vues du manoir de famille ou de son parc.

La mode du « japanware » se répandit, bien que ces objets, produits à Pontypool, fussent très onéreux donc accessibles uniquement aux gens fortunés.

L’engouement pour le « japanware » de Pontypool fut tel qu’on prétend que Charles Hanbury fit présent à la Grande Catherine de quelques belles pièces lorsqu’il était ambassadeur à la cour de Russie entre 1755 et 1757.

La demande ne faisant que croître, l’activité s’amplifia et prospéra. Elle s’exporta largement, notamment en Amérique. Des manufactures s’implantèrent à Usk, dans les Midlands, mais le « japanware » fabriqué à Pontypool était considéré comme le meilleur.

La famille Algood continua à garder jalousement le secret de la recette originelle de son vernis.

La rivalité entre Usk et Pontypool

Avant que Edward Allgood ne meure en 1763, la production de « Japanware » était passée entre les mains de ses fils et neveux, Thomas, Edward, John et Thomas. Quasi immédiatement après, de sévères dissensions se développèrent entre eux ; Thomas et Edward abandonnèrent les activités sur Pontypool et établirent leur propre manufacture à Usk, à quelques lieues de là. La majorité des appuis financiers de l’entreprise et des ouvriers les suivirent.

John et son cousin Thomas restèrent à Pontypool et durent s’appuyer sur l’aide financière de deux avocats, Davies et Edwards. Leur investissement permit d’assurer le capital nécessaire pour maintenir la marche de l’entreprise et remplacer certains employés indispensables partis à Usk, tels John Stockam, le principal décorateur. Il fut remplacé par Benjamin Barker dont le style maniéré caractérise la production de Pontypool de 1763 à 1781.

Durant les vingt années suivant la rupture, les productions de Pontypool prospérèrent et se vendirent par l’intermédiaire de marchands dans les plus grandes villes d’angleterre. De nombreuses pièces furent commandées par des familles fortunées ce dont témoignent par exemple une vue de la Pontypool Park House (1765) et les armes de Sir Hildebrand Jacob (c.1770). Des pièces moins onéreuses furent exportées en Amérique par des marchands de Bristol.

En 1800, « Le Voyage au Pays de Galles » d’Evans décrit ainsi le « japanware » de Pontypool :

«Vu partout ; partout admiré ! Il y a bien sûr beaucoup d’imitations, à Birmingham et ailleurs, mais elles sont inférieures aux productions de la manufacture originale».

Les dernières années

En 1779, Thomas meurt. Une nouvelle dispute survient à nouveau entre ses héritiers, ses fils Henry et William. Henry part à Birmingham où il travaille avec une manufacture de « japanning » installée depuis 1740, John Taylor & Co. William poursuit seul l’activité et, du fait de sa capacité naturelle de vendeur, est surnommé « l’homme à la valise ».

Les manufactures du Midland avaient atteint leur propre maturité, produisant un « japanware » d’excellente qualité qui entrait en compétition avec celui de Pontypool. La manufacture rivale de Usk était toujours en activité.

Pour contrer cette concurrence, William entreprit d’accroître sa production, de baisser les prix et d’augmenter la qualité. De nouveaux marchés, en attente de produits finis, apparaissaient en France, en Hollande et en Amérique. Peu fragiles, ces produits ne posaient pas de problème pour être transportés sur de longues distances.

Des exemples de la production de Pontypool peuvent ainsi se rencontrer dans de grandes maisons de la côte Est des Etats-Unis. Paul Revere, négociant d’objets en argent en temps de paix, mais surtout connu pour son rôle dans la guerre d’indépendance, vendait du « japanware » dans son magasin de Boston.

L’accroissement de la production sous William induisit une nouvelle et plus large activité. La production se répartit en deux endroits de Crane Street. Upper Crane Street devint alors connue sous le nom de Japan Street.

Malheureusement, du fait des disputes familiales, la manufacture de Pontypool déclina. Elle ferma en 1817.

En 1926, les bâtiments furent démolis. Il ne nous reste que le souvenir d’une activité qui fut célèbre dans le monde par la beauté des objets qu’elle produisait.

Usk

Quand Edward Allgood mourut en 1763, une discorde éclata entre ses trois fils et neveux (John, Thomas, Edward et Thomas). Elle finit avec le départ de deux des fils qui quittèrent Pontypool pour installer leur propre manufacture à Usk, attirant d’ailleurs la majorité des soutiens financiers et des ouvriers. On dit que la querelle survint à propos du partage des secrets du procédé de fabrication, querelle qui ne fit que se compliquer, le temps passant.

Les rivalités des années 1760

Une période d’intense rivalité suivit donc la rupture entre les productions de Usk et la manufacture de Pontypool. Une série d’annonces, parues dans le « Gloucester Journal » à l’été 1763, constituent une intéressante source d’informations sur les deux manufactures. Elles révèlent que la manufacture de Usk avait au moins trois agents de vente dans le quartier marchand, à la mode, de Londres, ce qui témoigne de la notoriété de ses produits. Cela montre aussi clairement que la plus grande part des avoirs et des clients de la manufacture originelle avaient été récupérés par Usk après la dispute.

Les dernières années à Usk

Les activités de Usk continuèrent à être florissantes jusqu’au tournant du 19ème siècle, quand Edward Allgood mourut. Il avait vécu plus longtemps que son frère Thomas et son neveu Thomas. A sa mort, ses activités furent transmises à John Hugues, puis John Pyrke et finalement à Evan Jones vers 1826, lequel eut du mal à concurrencer le « japanware » sur métal et papier mâché, moins onéreux produit par les Midlands.

Il relégua la vente du « japanware » dans l’arrière boutique de son commerce de détail et en réduisit la production. Le commerce s’étiola, en particulier après l’apparition des procédés de décoration par électrolyse. La vente cessa à la mort de Evan Jones en 1860 et le stock restant fut vendu aux enchères.

Midlands

Dans les Midlands, une finition « japanned » était appliquée à une large variété de produits incluant le fer-blanc, le papier mâché, le bois, l’ardoise et le cuivre. Une partie du 18ème siècle et durant tout le 19ème siècle, les Midlands furent le premier centre pour cette industrie, en particulier à Birmingham et à Wolverhampton, villes caractérisées par une production de grande qualité.

Les musées de Wolverhampton sont connus comme détenant la plus large collection publique de produits « japanned » d’Angleterre.

De nombreuses manufactures expérimentèrent divers revêtements destinés aux objets en métal ou en bois afin de rivaliser avec les objets laqués ou « japanned », qui étaient alors à la mode mais onéreux.

Du fait des déplacements d’ouvriers de cette industrie, entre le Sud du Pays de Galles et les Midlands, tous les objets en étain « japanned » étaient décrits comme provenant de Pontypool. Beaucoup de manufactures des Midlands se décrivent d’ailleurs elles-mêmes comme produisant un « fin travail de Pontypool ». C’est probablement dû à l’origine, à la qualité et à la conception des formes et décors des premières productions de Pontypoll.

Le succès de la production de « japanning » des Midlands est largement dû à l’esprit d’entreprise de quatre hommes : John Taylor, John Baskerville, Stephen Bedford et Henry Clay. Taylor se concentra sur la production de petites pièces telles que des boutons émaillés et des boîtes à mouchettes en étain. Baskerville breveta, en 1742, un procédé de façonnage des pièces de vaisselle par des rouleaux ayant la forme désirée. Stephen Bedford fut le premier à être enregistré comme « japanner » en 1755. Il perfectionna un vernis pour le papier mâché et expérimenta également des finitions pour le bois. Henry Clay développa une large et fructueuse activité et fut un pionnier dans l’utilisation d’une puissante forme pour papier mâché, ce qui accrut la variété des usages qu’on pouvait faire de cette matière.

Birmingham

En 1753, Henry Clay fut apprenti, à Bermingham, chez John Allport, peintre et dessinateur, avant d’établir un partenariat avec John Gibbons, installé à Newhall St, Birmingham. Il s’établit finalement lui-même à son compte en 1772, obtenant des lettres patentes de producteur de panneaux en papier mâché vernis de toutes sortes, pour des usages aussi bien pratiques que décoratifs, dont des panneaux et des toits pour les carrosses. Il s’agissait d’un matériau extrêmement dur et résistant. On a pu parler de « papier métal »!

La firme Jennens and Bettridge prit plus tard la relève de Henry Clay. Elle se focalisa au départ sur la production de plateaux en papier mâché. Joseph Booth, employé comme décorateur et célèbre pour ses imitations d’ornementations chinoises et japonaises, décora ainsi un plateau dans le style chinois pour le Prince Régent.

La firme, forte de ce royal soutien, se désignait comme « Japenners ordinaires de sa Majesté ».

Elle connut aussi des développements dans la préparation de coquilles d’huîtres, fort utilisées dans la décoration des objets « japenned ». Elle obtint aussi des lettres patentes lui permettant d’utiliser des morceaux de verre, des pierres semi-précieuses, des perles, de l’émail et autres matières pour ses décorations.

Elle fut en pointe dans la décoration « japanned ».En 1844, « The Penny Magazine » de décembre la décrit comme l’une « des plus raffinées et plus intéressantes manufactures de Birmingham, où le papier mâché est porté à un haut degré de beauté ». C’était une des plus grandes manufactures, en constant progrès et qui atteint un rayonnement mondial.

Wolverhampton

Wolverhampton était une ville bien assise dans la métallurgie, mais qui, de façon surprenante, ne se livra au commerce du « japanware » que vers le milieu du 18ème siècle.

Le premier fabricant reconnu à Wolverhampton fut un certain John qui avait travaillé auparavant à Pontypool. Il s’associa au sieur Taylor et établit une manufacture produisant de la tôle peinte et du papier mâché : « The Old Hall Works ». On sait peu de choses sur sa production et les activités furent reprises en 1783 par Obadhia et William Ryton.

Vers 1800, un désaccord industriel survint et beaucoup des ouvriers et des décorateurs passèrent dans d’autres manufactures, certains s’établissant même à leur compte. Cependant, la fabrique survécut et on la connaît surtout comme ayant employé Edward Bird dont on pense qu’il fut le premier à avoir décoré des plateaux ovales en étain d’une couche dorée polie.

En 1820, Benjamin Walton rejoignit la fabrique et la reprit au départ de William Ryton. Il eut une grande influence sur le style décoratif de la manufacture. Il introduisit des décors figurant des intérieurs d’église, des maisons ou châteaux célèbres, peints sur des fonds dorés ou de couleur bronze. Ce style fut connu sous le nom de « Wolverhamton style » et fut presque immédiatement copié par la concurrence.

Lors de la récession vers 1840, la manufacture fut mise en faillite mais fut rapidement reprise par Frederik, le fils de Walton, qui la redressa et parvint à produire des pièces très prisées lors des expositions des années 1850.

Son influence s’élargit et il semble que beaucoup de manufactures de Wolverhampton aient été fondées par des hommes qui avaient fait leurs armes à « Old Hall Works ».

Les activités cessèrent en 1882 et les bâtiments furent démolis en 1883.

Les frères Mander

En 1792, les frères Mander établirent une boutique de « japanning » à John Street, Wolverhampton. Benjamin en assurait la direction avec Charles, vernisseur, et John, pharmacien chimiste. On sait peu de choses des premières productions mais, en 1811, ils fournirent un cartonnier et certains objets aux chambellans de Worcester, à côté de porcelainiers et de détaillants d’objets à la mode. Cela donne une indication sur le haut niveau de standing de la firme.

Charles Mander, le fils de Benjamin, prit la direction en 1818. Vers 1830, le commerce des objets vernis semble avoir pris le pas sur le « japanware ». Cependant la production continua jusque vers 1840, quand Mander décida de se concentrer sur le vernis et vendit sa manufacture de « japanware » à William Shoolbred. Mander continua cependant à fournir les manufactures en vernis.

Henry Loveridge and C°

Peu après, Shoolbred s’associa avec Henry Loveridge et transféra les premières installations de John Street à « The Merridale Works » qui fut achevé en 1848. La firme prospéra après plusieurs associations pour devenir finalement « Henry Lovridge and Co », l’une des plus importantes manufactures de « japanware » dans les Midlands. Au début, on s’interrogeait sur le bon goût de la firme dans la mesure où elle fabriquait principalement des articles d’usage plutôt que décoratifs. Cependant, à l’Exposition de 1867 à Paris, ses produits furent qualifiés d’ « hautement satisfaisants », ce qui corrobore son savoir-faire et sa réputation grandissante.

La firme employa un artiste nommé Richard Stubbs. De nombreuses pièces dont on lui est redevable ont survécu et sont maintenant exposés à Bantock House. Cette collection est intéressante parce que c’est une des rares où la production d’un artiste en « jappaning » peut être réellement attribuée.

Bilston

La première mention de « japanners » dans les registres paroissiaux de Bilston apparaît en 1718. Joseph Allen et Samuel Stone sont cités, mais à titre accessoire, car leur première activité était celle de l’industrie du métal, laquelle fut reconnue de plein droit en 1781.

Les manufactures de Bliston fabriquaient peu de papier mâché et produisaient généralement des articles de bas de gamme. Cela est dû au fait qu’elles exportaient la majorité de leur production vers l’Espagne et l’Amérique du Sud où la qualité passait derrière le goût des couleurs brillantes et des bas prix. Le coût du travail était aussi plus bas à Bilston que dans les autres centres de production des Midlands. Les manufactures de Bilston furent de ce fait bien moins touchées par les évolutions du marché ou les changements de goût et de modes.

Un petit nombre de manufactures survécurent jusque vers 1930.

__________

Mots-clés: ,

*Bibliographie

yves Publié le 9 juin 2007 Mis à jour le 16 janvier 2009

___________

 

Publications françaises

 

 

Noblesse de la tôle peinte 

Connaissance des Arts, octobre 1977,  pages 70-75

 

Beckford, Madame de Pompadour, The Duc de Bouillon and The taste for Japanese Lacquer in the 18th century

Francis J.B Watson, France, Gazette des Beaux Arts 1963

 

Second Supplément à la Collection des Œuvres du Musée Le Secq des Tournelles               

Genève 1789 (3vol) : Album d’un commissaire en marchandises

 

Catalogue du Musée Le Secq des tournelles, Rouen, Ferronnerie ancienne, Supplément

Henri-René d’Allemagne

Paris, Imprimerie Schemit, 1924

 

 

Les manufactures de tôle vernie à Paris vers 1760-1770 : veuve Gosse et François Samousseau « La petite Pologne »  Wolvesperges Thibault 2004 in Objets d’art : mélanges en l’honneur de Daniel Alcouffe Dijon, Faton,2004 ISBN 2-87844-068-4 p 272-279

                                                            

 

Chefs d’œuvre en tôle vernie de l’époque consulaire et impériale (1801-1806)

Jean-Pierre Samoyault in Revue du Louvre 1977n°5-6 p 322à 333

 

 

Le meuble français en laque au XVIII ème siècle

Thibault Wolvesperges; préface de Daniel Alcouffe

 Paris, Editions  de l’Amateur,2000 445p

 

 

Les plus beaux meubles peints par Florence de Dampierre

 Editions Image/Magie 4 rue Diderot 92156 Suresnes

 

 

Les accessoires du costume et du mobilier du XIIIème jusqu’au milieu du XIXème siècle

Henry-René d’Allemagne

Paris Schemit 1928, pages 196-199

INHA cote HY281/1, 2, 3

 

Dictionnaire raisonné universel des Arts et Métiers

Abbé Pierre Jaubert

Paris PF Didot Jeune 1773

 

Le Meuble – Alfred de Champeaux – vol II

A Quantin Paris 1885

Société française d’édition d’Art/ LH May

INHA

 

Encyclopédie Roret – Peinture et vernissage des métaux et du bois – p109

 

Objets d’usage et de goût du XIXème siècle

Marie-Noëlle de Gary et Geneviève  Musin

Paris 1993

 

 

L’art du peintre, doreur, vernisseur

Watin Jean-Félix

Paris 1773, Paris Leonce Laget 1975

INHA cote 12K0393

 

Dictionnaire de l’ameublement et de la décoration depuis le 13ème siècle jusqu’à nos jours

Havard Henry

Paris, Maison Quantin 1887-1890

 

 

Traité des vernis où l’on donne la manière d’en composer un qui ressemble parfaitement à celui de la chine, traduit de l’italien Buonanni

Paris Editions Moury 1723

INHA 12K0265

 

Nouveau manuel du fabricant de couleurs et de vernis

Madame Riffaut

Paris Editions Roret  1862

 

Traité des vernis

Laurent d’Houy

Paris 1733

INHA cote 12K013

 

Etains, cuivres, bronzes, tôles peintes, fers forgés, cuivres repoussés.

Imprimerie Aubert 1964

INHA

 

Tôles peintes et Bois laqués du 18ème et 19ème siècle

Imprimerie Collet 1986

INHA

 

Une demeure parisienne au 18ème siècle

Collection Henriette Bouvet léguée au musée Carnavalet

Ville de Paris 1968

Bibliothèque du musée Forney ; cote CMP3614  

 

 

 

 

Publications Anglaises

 

 

Pontypool and Usk Japanned wares

John William David et Anne Simcox

Bath Angleterre

Harding and Curtis 1984

 

Welsh laque in Holland

1700

 

Pontyopool and Usk Japanned Wares

W D John 1953

Newport Uk: The Ceramic Book Company

 

Lacquer: Technology and Conservation

Webb Marianne 2000

Butterworth Heinmann

 

The Handmaid to the Arts

Robert Dossie 1742 1764

 

A Treatise on Japanning and Varnishing

John  Stalker and George Parker 1688 1971

London: Alec Tirani

 

Pontypool and Usk Japanned Wares with the Early History of the Iron and Tinplate Industries at Pontypool

John, W D

 Newport Mon England, 1953

 

The British Tinplate Industry: A History

Minchinton, W E

Clarendon, Oxford, 1957

 

The Book of Collectible Tin Containers with Price Guide

Pettit, Ernest L

Forward’s Color Productions, Manchester VT, 1967

 

 

 

Publications américaines

 

Lacquer of the West

Hutu 1971

University of Chicago Press

 

 

Tin, Sheet-Iron, and Copper-Plate Worker

Blinn, Leroy J

Henry Carey Baird & Co, NY, 1920

 

Sheet Metal Workers’ Manual

Broemel, L.

Frederick J. Drake & Co, Chicago, 1935

 

Tinman’s Manual and Builder’s and Mechanic’s Handbook

Butts, I R

Boston, 1865

 

The History & Folklore of American Country Tinware, 1700-1900

Coffin, Margaret

T. Nelson, Camden NJ, 1968

 

Sheet-Metal Pattern Drafting and Shop Problems,

Daugherty, James S

 Manual Arts Press, Peoria, IL, 1922

 

The Tinsmiths of Connecticut

DeVoe, Shirley Spaulding

 Wesleyan University Press for the Connecticut Historical Society, Middletown, CT, 1968

 

The Art of the Tinsmith

DeVoe, Shirley Spaulding

Schiffer Publishing Ltd, Box E, Exton PA, 1981

 

Tinner’s Hardware & Finishing Goods

Dover Stamping Co

Boston 1869.  Reprint Astragal Press

 

Antique Tin and Tole Ware

Gould, Mary Earle

Tuttle, Rutland VT, 1958

 

Hall & Carpenter’s Catalogue of Tinsmiths’ Tools and Machines

Philadelphia, 1878

 

 

 Shop Drawings of Shaker Iron and Tinware

Handburg, Ejner

 Berkshire Traveller Press, Stockbridge, MA, 1976

 

The Technology of Tinplate

Hoare, WE, ES Hedges, BTK Barry,

St Martin’s Press, NY, 1965

 

Early American Copper, Tin, and Brass

Kauffman, Henry J

McBride, NY 1950

 

To Cut Piece and Solder, The work of the Rural Pennsylvania Tinsmith, 1780-1908

Lasansky, Jeannette

PA State University Press, University Park PA, 1982

 

American Painted Tinware, A Guide to its Identification, Vol 1

Martin, Gina & Lois Tucker

Historical Society of Early American Decoration Inc, NY, 1996

 

The Universal Sheet Metal Pattern Cutter, Vol 1&2

Neubecker, William

 The Sheet Metal Publication Co, NY 1920

 

Sheet Metal Work

Newbecker, William

 American Technical Society, Chicago, 1941

 

 The Origins and Craft of Antique Tin & Tole

Player, John

Norwood Publishing, Brockville ONT Canada, 1995

 

The Mechanic’s Calculator and Tinman’s Guide

Quantrill, Thomas H

Washington, 1847

 

Modern Sheet-Metal Worker’s Instructor

Rose, Joseph H

Chicago, 1906

 

Tinware Yesterday and Today, Applied Arts

Smith, Elmer L

Lebanon PA, 1974

 

Tinsmiths’ Tools & Machines Manufactured by the Peck Stow & Wilcox Co

 Centennial Edition 1800-1900, Reprint, Astragal Press, 1993

 

 

The Tinsmith’s Helper and Pattern Book

MJ Weeks Pringer

Vosburgh, HK

Unionville CT, 1879. Reprint Astragal Press

 

Nineteenth Century Tin Roofing and Its Use at Hyde Hall,

Waite, Diana S

 NY State Historic Trust, Albany NY, 1971

 

 

Sheet Metal Worker’s Instructor

Philadelphia PA, 1875

 

Articles

 

Carpentier, Donald, ‘Observations on Dating Tinware,’ The Decorator, Journal of the Historical Society of Early American Decoration, Inc, Vol XL, No 1, Fall, 1985

 

Demer, John, ‘How Tinsmiths Used Their Tools,’ Chronicle, Early American Industries Association, December, 1985

 

DeVoe, Shirley Spaulding, ‘The Perry Tin Shop of Saxtons River Vermont,’ Vermont History, Summer, 1975

 

DeVoe, Shirley Spaulding, ‘The Upson Tin and Clock Shops,’ Bulletin, Connecticut Historical Society, July, 1961

Swan, Mabel M, ‘The Village Tinsmith,’ Antiques, March, 1928

 

Autres publications étrangères

 

Chinoiserie, Chinese Influence on European Decorative Art, 17th and 18th centuries

Madeleine Jarry, Fribourg, 1981, p216

 

Stobwasser  Lacquer art from Braunschweig & Berlin

2 volumes

Prestel publishing house 2005

ISBN 3-7913-3439-5                       

Mots-clés: ,

3.1.2 ° Difficultés économiques des manufactures

yves Publié le 25 mai 2007 Mis à jour le 1 novembre 2007

_____________

Le siècle des Lumières est celui où l’extension du commerce incita l’artisanat à s’étendre, débouchant sur la création de petites manufactures, pour employer un vocable de l’époque. Si la haute bourgeoisie ou la petite noblesse y réussissaient de temps à autre, il faut bien reconnaître que les moins fortunés y essuyèrent de nombreux revers, faute de protection princière ou de capitaux suffisants. En outre, leur manque d’attachement à des réseaux solides, bien souvent familiaux, limitait nettement leur activité, tant du côté des fournisseurs que du côté des clients.

Des difficultés des inventeurs

La position de l’inventeur d’un nouveau produit, ou mieux, dans notre cas, du détenteur d’un brevet protégeant son invention et des lettres patentes en garantissant l’exclusivité était alors des plus aléatoires, car former une société ayant pour objet son exploitation était une aventure très onéreuse et combien risquée.

La situation l’obligeait le plus souvent à se tourner vers des investisseurs suffisamment fortunés pour l’aider au démarrage, mais qui, en retour, ne lui laissaient généralement que peu de part active dans sa direction En effet, si les financiers couvraient presque entièrement l’opération, ils devaient également en supporter les risques accrus en cas d’exploitation d’une marchandise généralement inconnue du public. Son succès dépendait également trop de la mode, très fluctuante à Paris, ce qui les encourageait, voire les obligeait à se réserver pratiquement plus de quatre-vingt-dix pour cent des parts de la société.

Leurs contrats de création, généralement méconnus dans le domaine des arts décoratifs, peuvent se comparer à de véritables contrats types, dont la précision des termes dépendait de la qualité des associés. Ils sont intéressants à plus d’un titre. D’abord, ils témoignent de l’existence de deux intérêts divergents au sein de la même manufacture, celui de l’inventeur, pensant avoir trouvé une véritable poule aux œufs d’or, et celui des financiers, croyant en la fructification de leur nouveau placement, tout en se protégeant le mieux possible contre tout aléa.

Pour ce faire, ces derniers exigeaient le plus souvent une période d’essai, nécessitant un capital réduit.

Ainsi les associés de la Manufacture de la Veuve Gosse et Samousseau ont-ils prévu un capital réduit de 25 000 livres pour tester la nouvelle invention, en déterminer le succès éventuel et la rentabilité ( Arch. Nat., Min centr.,XLVIII, 186, 30 mars 1771)

La situation de l’inventeur est, on le comprend aisément, nettement moins confortable : il n’aura en définitive aucun rôle stratégique au sein de l’entreprise et sera, en outre, obligé de divulguer son secret. Il se retrouvait ainsi confiné dans un rôle proche de celui d’un employé, au salaire fixé par la direction, et recueillant rarement un pourcentage sur les bénéfices, sauf s’il pouvait faire état d’un apport éventuel, comme des marchandises, outils ou créances préexistantes.

C’était le prix à payer, celui-ci ne participant, il est vrai, aucunement au risque financier de l’aventure. Plus grave, son sort pouvait dépendre de la situation pécuniaire des investisseurs, qui ne partageaient bien entendu pas du tout le même but que lui, obsédés uniquement par l’appât de bénéfices plantureux. Leurs critères de rentabilité, outre celui de la rapidité des gains, s’analysaient différemment, notamment en fonction d’autres placements, dont la viabilité pouvait, a contrario, peser sur leur décision du moment et, du jour au lendemain, les forcer à quitter l’entreprise.

Certains associés de la Manufacture de la Petite Pologne, suite à l’échec d’une manufacture de chapeaux dont ils étaient actionnaires, virent leur situation financière fragilisée et durent se retirer de l’entreprise (Arch. Nat., Min. centr., X, 618, 28 mars 1770 et ibidem, XLII, 524, 13 août 1771).De même, un autre investisseur de ladite entreprise, Falquet-Duvivier, subit d’importants revers financiers dans une manufacture de faïence du Faubourg Saint-Antoine ( ibidem,LXII, 546, 29 janvier 1773).

Dans le cas de deux sociétés qui vont être ici étudiées, ces intérêts antagonistes régiront constamment leur évolution. Notons cependant que lors de leur création, apparaît une différence intéressante : le rapport unissant les inventeurs et les associés ne fut pas identique, les premiers, dans le cas de la manufacture de la Petite Pologne, bénéficiant de parts plus importantes

Ces contrats débutent par un préambule indiquant, d’une part, le ou les noms des propriétaires de l’invention, ainsi que celui des investisseurs et, d’autre part, la raison de l’association, généralement un manque de capitaux, suivi le cas échéant d’un résumé de la société préexistante. Le premier article concerne sa durée de vie, subordonnée parfois à l’existence de lettres patentes, alors clairement décrites ; sinon, ce seront les bénéfices qui en détermineront la viabilité. Viennent ensuite les articles régissant les rapports entre les associés, soit la répartition des parts respectives entre les actionnaires, la nature des apports de fonds et leurs échéances éventuelles, la possibilité d’avoir des voix dans le conseil de délibérations et leur conditions d’obtention, enfin, la répartition des bénéfices en fonction des contributions respectives, qui n’aura lieu qu’après le paiement des différents frais de la société, tels les appointements des ouvriers, les loyers, etc.

La situation des inventeurs est alors clairement précisée : au prorata de leurs avoirs, ils obtiendront des parts dans la société mais rarement dans le conseil de délibérations. Une séparation nette des pouvoirs est ainsi établie. Si les investisseurs tiennent les rênes de la société, le ou les inventeurs sont généralement cantonnés dans le rôle de directeur technique, responsable des ateliers et des ouvriers. Ils ont droit à un salaire mensuel, qui sera remplacé, le cas échéant, par le paiement des intérêts de leur investissement, uniquement si ceux-ci couvrent le salaire prédéterminé. Quant à leur fameuse formule, les associés en exigent la divulgation, tout en garantissant la protection par son enfermement dans un coffre dont seuls deux associés et l’inventeur auront la clé.

Quelques clauses supplémentaires montrent que, dorénavant, cette formule n’appartient plus à son inventeur et qu’il ne pourra la récupérer qu’au moment de la dissolution de l’entreprise.

Les autres articles concernent l’administration de la société et évoquent la possibilité de sortie d’un des associés, la tenue des livres comptables, les conditions d’emprunts effectués par la société et, enfin, les démarches à suivre en cas de contestation entre les associés. Ces derniers articles ne concernent généralement pas les inventeurs.

Des difficultés de la manufacture Veuve Gosse et François Samousseau

Comme nous allons le voir, deux manufactures connaîtront une destinée fort proche, leur sort étant malheureusement trop dépendant de celui des investisseurs qui les abandonneront dès la moindre inquiétude concernant leur rentabilité.

Ainsi Pierre Millot, intéressé dans la Manufacture de la Petite Pologne, invoque-t-il pour s’en retirer la situation précaire de l’entreprise, les ventes ne correspondant pas à ses espoirs (Arch. nat.., Min. centr., X,618, 28 mars 1770).

Les recherches d’un obscur Michel Nicolas Gosse, maître peintre, sculpteur et vernisseur, sont à l’origine de la Manufacture royale de vernis façon de la Chine, appelée plus tard Manufacture Veuve Gosse et François Samousseau .

Son décès prématuré à l’âge de 43 ans ne lui permit pas de jouir de l’approbation par l’Académie des sciences de son invention, un vernis qui contrairement à ce que l’on pensait, était « un des meilleurs que l’on pût employer pour les boites à tabac, et qu’il pourrait servir à préserver de la rouille les ouvrages en fer, et notamment les canons de fusils des équipages de la marine… ».

Sa veuve reprit le flambeau, aidée par son gendre, François Samousseau. Cependant, malgré la protection royale de quinze années dont jouit cette manufacture grâce aux lettres patentes accordées en mars 1768, pour un vernis aux vertus plus étendues « façon de la Chine … applicable sur toutes sortes de métaux, sur bois, cuirs, cartons, papiers, terre cuite ou crues, fayence et porcelaine avec dorures et autres couleurs », elle ne connaîtra pas moins de sept changements d’actionnaires jusqu’en 1777.

En effet, les deux protagonistes se trouvèrent bien vite dans l’obligation de recourir à des financiers extérieurs pour assurer la pérennité de l’atelier, qu’ils avaient difficilement réussi à monter, mais ceux-ci, malgré un intérêt certain, jetèrent chacun à tour de rôle l’éponge, faute de débouchés suffisants. L’un d’eux, qui n’avait investi qu’à la condition suspensive de l’obtention du gouvernement d’un marché pour protéger avec ce vernis les canons de fusils et les casques de l’armée, rappelant ainsi les termes cités plus haut, se retira aussitôt que l’accord gouvernemental lui eût été refusé.

Pourrions-nous alors imputer ces échecs à l’insuffisance des capitaux ? Rien n’est moins sûr car, par exemple, le capital investi en 1774 s’élevait à 150 000 livres, somme qui pourrait paraître satisfaisante pour honorer les créanciers et continuer le travail sur des bases plus saines, si l’un des associés, le principal, n’avait eu la mauvaise idée de décéder, ce qui encouragea ses acolytes à quitter au plus vite le navire. La veuve Gosse eut de plus, les malheurs n’arrivant jamais seuls, des difficultés à récupérer son privilège, mais il est certain que, par la suite, la propriété de la manufacture revint dans le giron de la famille Gosse-Samousseau, qui privilégia ensuite des ouvrages de serrurerie et les marchandises annexes. A son décès en juin 1791, son beau-fils, François Samousseau, portait encore le titre d’entrepreneur de la Manufacture royale des vernisseurs sur métaux, sise rue des Marais, paroisse Saint-Laurent.

Contrairement à la Manufacture de la Petite Pologne qui diffusait ses créations via des concessionnaires parisiens, celle-ci commercialisait ses produits en son magasin, d’abord boulevard du Temple et enfin, après différents déménagements, rue des Marais. Les marchandises décrites dans ses magasins en 1776 couvraient deux domaines : d’abord, la part la plus importante, celui des serrures et produits dérivés, qui valaient presque le triple des objets de tôle, ce qui sauvera d’ailleurs la manufacture de la faillite ; ensuite celui des objets de tôle vernie, tels rafraîchissoirs, vases, verrières ou plateaux, aux décors très variés, se détachant sur des fonds de touts les couleurs, parmi lesquels des cartels décorés d’animaux ou de Chinois en relief, agrémentés d’oiseaux, de fleurs, de trophées ou de paysages, voire , pour les plus beaux de jeux d’enfants, des marines ou des médaillons antiques ; notons que seuls deux seaux à bouteille étaient enrichis d’armoiries, en l’occurrence celles de la famille Choiseul.

Nous avons également pu relever la présence dans les ateliers de deux armoires vernies et « japonnées », ainsi que d’une encoignure, estimée 150 et 60 livres. L’existence de seulement trois meubles sur plus de 1100 pièces de forme indique toutefois leur caractère plutôt exceptionnel et trahit, sans doute, une commande particulière.

Des difficultés de la Manufacture de la Petite Pologne

Quant à la Manufacture de la Petite Pologne, le Dictionnaire de l’Industrie notait en 1776 à son propos : « En 1770, il s’établit à la Petite Pologne, barrière Monceaux, une manufacture de vernis sur tôle, où l’on trouve fontaines pour salles à manger, seaux à verres et à bouteilles, écritoires, chandeliers, bassins à barbe, toilettes, garnitures de cheminée, corbeilles à fruits, plateaux à dessert, vases à l’antique, etc. ».Concurrente directe de la précédente, cette deuxième manufacture put être créée à la même époque, nonobstant le privilège royal accordé à cette dernière, ce qui relativise sérieusement la portée de ces fameuses lettres patentes.

Elle comptait, en 1771, vingt ouvriers, notamment trois polisseurs, quatre ponceurs, huit peintres, doreurs ou vernisseurs, deux « ferblanquiers », sans compter les deux associés d’origine, Clément et Moser (cf. Arch. nat.,Min. centr. XLII, 523, 11 mai 1771)

Ainsi en 1768, ou un peu avant, un certain Jacques Moser, garçon ferblantier, découvrit un nouveau vernis façon de la Chine sans odeur et applicable sur toutes sortes de matériaux, aux vertus proches de celui inventé par Gosse. Fort de sa découverte, il décida d’établir une manufacture et de donner à ses ouvrages le goût, la forme et le décor des ouvrages en provenance du Japon. Pour ce faire, il se lia d’intérêt avec Jean-Baptiste Clément, maître peintre et doreur, qui paraît avoir d’ailleurs rapidement pris le pas sur lui.

Le 24 juillet 1769, Clément inséra dans l’Avant-coureur une annonce vantant les mérites de l’entreprise, en insistant sur les qualités intrinsèques de son vernis, notamment sa grande résistance à la chaleur. Il y était précisé, en outre, que les Commissaires de l’Académie avaient pu en vérifier l’exactitude.

« Le sieur Clément, maître peintre, doreur et vernisseur à Paris, fait exécuter en tôle toutes sortes d’ouvrages d’ornement, dans les modèles les plus nouveaux et les mieux choisis…les ouvrages ainsi vernis sont ornés de différents genres de peintures, comme fleurs, fruits, paysages, cartouches avec figures et tableaux reliefs du Japon et autres… Ceux qui voudront faire commander quelques articles à leur goût, seront servis avec exactitude dans le courant du mois. La Manufacture est établie à la Petite Pologne, Barrière de Monceaux, et le Dépôt des Marchandises, chez M. Sayde, quai des Morfondus, vis-à-vis Henri IV ». (H.Vial, A. Marcel et A Girodie , Les artistes décorateurs du bois, I, 1912, p108).

Mais, dès la seconde année d’exploitation, la situation financière difficile de certains associés menaça directement la vie de l’entreprise. Désireux de prévenir le public des changements nécessaires, Clément fit paraître plusieurs annonces publicitaires en 1770 ; Ainsi dans Le Mercure du mois de mai, il prévient : « qu’un de ses associés dans son entreprise de taule vernie, ayant désiré de retirer ses fonds, il s’est vu obligé d’exposer les marchandises en vente, rue de la Verrerie, sans cependant en suspendre la fabrication. Des arrangements qui lui ont paru plus avantageux l’ont engagé à cesser cette vente et remettre son magasin chez le sieur Framery, marchand bijoutier, rue Saint Honoré, où il était précédemment. C’est la que le Public doit s’adresse pour le choix des marchandises, qui s’y trouvent en abondance, ou pour les commandes qui seront exécutées avec encore plus de soin et d’exactitude qu’auparavant….Sa manufacture est toujours à la Petite Pologne. ».

Ensuite le 17 mai et le 2 août, il fit paraître dans Les Petites Affiches de Paris, deux avis fort proches, le second signifiant, en outre, le remplacement du commissionnaire Etienne Framery par le marchand Dulac, établi dans la même rue.

La société connut encore de sérieux problèmes en 1771, année où deux accords étaient entérinés pour éviter la vente forcée des marchandises saisies par des créanciers, ce qui aurait été catastrophique pour la pérennité de l’entreprise. En outre, deux des principaux actionnaires se sont retirés, leur situation financière personnelle étant fortement grevée par les pertes enregistrées

Le bilan de la manufacture est alors plutôt négatif et peu encourageant. Il leur reste en commission chez Dulac pour plus de 12 000 livres de marchandises et, dans leur entrepôt, pour plus de 16 000 livres d’objets pour une grande part inachevés et donc difficilement négociables. Les ventes sont un véritable désastre et montrent le peu de succès rencontré par ces nouveaux produits, ce qui débouchera plus vite que prévu sur la fermeture définitive de la manufacture, soit dès le mois de décembre 1772, les dernières marchandises étant envoyées à l’Hôtel Jabach pour y être dispersées à l’encan.

Des succès commerciaux laborieux

A la lecture des péripéties de ces deux manufactures, la question du succès commercial de ces nouveaux produits en tôle vernie doit être posée. Outre les conflits financiers importants rencontrés parmi les investisseurs et dont la situation économique externe à ces entreprises pesait trop sur leurs décisions, les ventes aux particuliers sont peu encourageantes.

L’exemple de la Manufacture de la Petite Pologne est édifiant. Sur les 540 pièces livrées au marchand Dulac le 7 mai 1770, pour une valeur proche de 13 500 livres, celui-ci n’en vendit en une année que pour 380 livres et, l’année suivante, pour 882 livres. Un autre lot livré conjointement rencontra un peu plus de succès, mais le bilan global montre que, malgré le choix du concessionnaire, la manufacture dut reprendre près de 85 pour cent des pièces livrées.

Les raisons de cet échec sont complexes. Si deux manufactures produisant à peu de choses près les mêmes produits au même moment rencontrent les mêmes difficultés, l’argument unique de la concurrence mutuelle ne peut suffire à l’expliquer ; Les produits sont certainement différents, la veuve Gosse n’ayant, semble-t-il, jamais fait jouer le privilège royal dont la manufacture était pourvue. A la lecture des nombreuses actions judiciaires intentées à l’encontre de la famille Martin, il apparaît que les procès pour protection d’un secret artisanal étaient fréquents. Il serait alors plus logique de se tourner vers la nature même du produit. Succédané des objets en véritable laque orientale, dont la matière permettait normalement de produire à des coûts nettement inférieurs des objets similaires, mais qui pouvaient également concurrencer des objets usuels en porcelaine en pleine expansion, tels des seaux à rafraîchir ou des vases, qui présentaient l’avantage de mieux s’intégrer sur une table au restant du service, ces objets en tôle vernie, n’atteignirent jamais le succès de leurs concurrents. Par leur assimilation aux objets usuels bon marché, produits en grand nombre, certainement pauvres en décor, ils ne pouvaient prétendre au remplacement de ceux-ci.

Si la société de la Petite Pologne ne se releva jamais de ces multiples échecs, il est par ailleurs symptomatique de constater que la Manufacture Gosse-Samousseau, dès le milieu des années 1770, ne se concentra plus que sur le marché des serrures et marchandises annexe. Le sort semble d’ailleurs, après l’abandon de la production d’objets plus usuels en tôle vernie, avoir été enfin favorable à cette entreprise ; François Samousseau terminera sa vie dans une certaine aisance, arrêtant ses activités, à la lecture des documents en l’an IX.

La concurrence des fabrications anglaises

D’autre part, depuis la fin des hostilités avec l’Angleterre, certains marchands merciers pourvoyaient Paris d’objets en tôle anglaise de même nature. Deux marchands s’illustreront principalement dans ce commerce, les Blakey et Granchez, qui avaient d’ailleurs racheté une partie du stock de la Petite Pologne en avril ou mai 1770.

Un inventaire des marchandises en tôle vernie des Blakey rédigé en 1776 répertorie notamment des seaux à bouteille et des verrières dont les prix semblent bien inférieurs à ceux enregistrés à la Manufacture de la Petite Pologne dix ans plus tard. Nous apprenons par un autre document, que ces négociants anglais s’approvisionnaient auprès des marchands Jacques Ch Grangès et Jacques Monbray de Londres ou de la société Glover & Chemiot de Birmingham, avec qui était également en relation le marchand Granchez à la tête du célèbre magasin « Au Petit Dunkerque ».

Malgré ses importations fréquentes, qu’il annonçait dans le Mercure de France, notamment au mois de décembre 1777, Granchez en faisait également produire lui-même en France, s’étant assuré les services de la veuve Clément, certainement de la famille du créateur de la Petite Pologne.

Déjà, dans un encart publié dans Le Mercure de France en octobre 1771, il nous apprend qu’il s’était assuré les services de deux ouvriers de cette ancienne manufacture.

C’est d’ailleurs principalement à travers les œuvres portant la marque du Petit Dunkerque que nous pouvons juger de la qualité des objets en tôle de nos deux manufactures, l’obligation prônée par les rédacteurs des lettres patentes de marquer les œuvres n’ayant, semble-t-il, jamais été respectée.

_______________

Mots-clés: ,

3.1.1 ° Panorama des manufactures parisiennes

yves Publié le 25 mai 2007 Mis à jour le 14 janvier 2009

 

___________

Panorama selon Henri René d’Allemagne

La manufacture du sieur Clément à la « Petite Pologne » en 1768

La première manufacture de ce genre qui se soit montée en France fut celle que le sieur Clément avait établie à en 1768 à la «Petite Pologne » à Paris (actuel quartier Monceau).

En 1770, le « Mercure de France » du mois de mai, informait que cet homme industrieux venait d’établir le dépôt de sa fabrique chez le sieur Framery, marchand bijoutier rue Saint Honoré, puis il ajoutait : « Les nouveaux efforts que le sieur Clément a faits pour atteindre à la perfection sont déjà récompensés par la qualité de fournitures qu’il a faites en voitures, baignoires, commodes et autres meubles. Ses couleurs perfectionnées ont achevé de rendre ses ouvrages dignes de la célébrité qu’ils avaient acquise. Sa manufacture est toujours à la Petite Pologne. ».quelques mois plus tard, Clément confiait le dépôt de sa fabrique au sieur Dulac demeurant rue Saint Honoré, près de l’Oratoire.

Reprise de la manufacture de Clément par Framery

Cependant, malgré ces annonces élogieuses, les produits de Clément étaient loin d’atteindre le degré de perfection qu’il leur prêtait et ils étaient très inférieurs aux ouvrages importés chez nous par les Anglais. Aussi l’industrie ne tarda pas à péricliter. Les ouvriers de la manufacture de Clément étaient sur le point de se disperser et de porter ailleurs leurs talents lorsque le sieur Framery, le premier dépositaire de Clément se hasarda à les rassembler pour les faire travailler à son compte.

« Framery, nous dit Jaubert, a abandonné les manières de traiter des Anglais quant à ce poli luisant dont il recouvrent le fond écaille qui sert de base à tous leurs ouvrages et quant à la beauté des peintures à moins qu’on lui demande exprès et que les amateurs curieux ne veuillent y mettre le prix. Pour se prêter au goût actuel du public, il ne fait exécuter chez lui que des ouvrages qui ont une couverte d’aventurine, de japonné, de faux-laque de Chine et de fausse porcelaine que l’on fait avec une certaine terre modelée en relief et qui conserve toujours un luisant mat malgré le vernis très limpide dont on recouvre l’or et les couleurs qu’on y applique. ».

La manufacture de Clignancourt 1778

En 1778, une nouvelle manufacture de tôle vernie était établie à Clignancourt et dans « Le Mercure de France » du mois de janvier de cette année, le propriétaire de cet établissement proposait au public : « des garnitures de cheminées et écritoires en tôle vernie de la fabrique de Clignancourt, très perfectionnées pour les peintures, tant à sujets qu’à fruits et à fleurs, imitant les plus belles porcelaines et garnies de bronze doré d’or moulu »

La manufacture du citoyen Deharme à l’exposition de 1799

En 1799, dans la première exposition d’art industriel que Paris ait vue et qui était organisée dans la cour du Palais National des Sciences et des Arts pendant six jours complémentaires de cette année, on avait fort admiré les objets de tôle vernie sortis de la manufacture du citoyen Deharme.

« Cet ingénieux artiste, disait Le Mois, a trouvé le moyen d’établir en tôle vernie et dorée des vases de la forme la plus élégante dans le genre grec ou étrusque et de les décorer de peintures les plus agréables et ornements les plus baignoire. Il demeure rue de la Magdeleine, près de l’ancienne église de la Ville l’Evêque ».

Le public faisait un accueil enthousiaste à ces objets tant à cause de leur aspect séduisant que de leur solidité et de leur bon marché relatif.

Les tôles du sieur Tavernier au 19ème siècle

Un des fabricants de tôles vernies les plus renommés du début du 19ème siècle était le sieur Tavernier (Jean ? cité dans l’index du tome III des Procès-verbaux du Directoire, 18 vendémiaire an VI, archives nationales), rue de Paradis 12, qui, à l’exposition des produits de l’industrie réunie au Palais du Louvre en 1819, avait présenté au public des vases, des plateaux et des sujets en tôle vernie de diverses couleurs, plaqués d’or et ornés de bronze.

Le rapporteur du jury d’admission à cette manifestation industrielle nous renseigne sur la fabrication du sieur Tavernier : « La manufacture du sieur Tavernier obtint en 1801 une médaille d’or. Depuis cette époque, elle s’est particulièrement attachée à perfectionner sa fabrication ainsi que le prouvent les objets qu’elle présente. C’est dans cette belle fabrique qu’ont été faits les grands vases de la Galerie de Diane et de la Chapelle du Roi. ».

A l’exposition de 1823, un concurrent sérieux de Tavernier s’était révélé : le sieur Pierre Lessard, rue Saint Denis 302, qui présentait entre autres objets, des lampes, quinquets et candélabres en tôle vernie.

Moirés métalliques

On doit faire rentrer dans la catégorie des tôles vernies le décor sur métal appelé « moiré » dont on rencontre encore de nos jours d’assez nombreux spécimen.

A l’exposition du Louvre en 1819, un certain Allard, rue Saint Lazare 11, avait présenté une série remarquable d’objets exécutés sur fer-blanc français et étranger décorés de moire métallique.

Le rapport du jury d’admission nous donne sur cette fabrication ainsi que sur la maison Allard les renseignements suivants : « La fabrication du moiré métallique, à laquelle on ne reproche que de se multiplier avec trop de facilité puisqu’elle est aujourd’hui aussi commune et aussi répandue que le fer-blanc et la tôle vernie, est pour les arts qui emploient le fer-blanc une découverte importante, mais déjà anciennement faite dans nos laboratoires de chimie et dont plusieurs fabricants ont néanmoins réclamé la priorité.

Monsieur Allard a plus que personne contribué à perfectionner les moirés et il est parvenu à en varier les effets au point de faire à volonté le moiré foncé, sablé, étoilé, et quadrillé double. C’est encore à cet artiste intelligent que nous devons les procédés pour obtenir avec les fers-blancs français tous les effets magnifiques qu’on n’obtenait primitivement que des fers-blancs anglais.

Le sieur Allard avait un concurrent en la maison Boileau et Vincent peintres, rue Saint Maur 76, qui avait exposé des fers-blancs moirés qu’ils appelaient « mosaïques métalliques » et étaient destinés à orner les meubles, cabinets et nécessaires.

L’industrie de la tôle laquée, après avoir subi un arrêt complet pendant la seconde partie du 19ème siècle, semble être revenue plus en honneur que jamais surtout près des collectionneurs qui s’arrachent à prix d’or quelques spécimens qui ont survécu de la production du 18ème siècle.

Panorama selon Denise Ledoux-Lebard

Comment un matériau industriel, transfiguré par d’habiles artisans, a pu rivaliser avec les matières les plus précieuses et conquérir une place de choix jusque dans les palais les plus prestigieux.

Dès leur apparition, les objets en tôle peinte connaissent un vif succès qui ne fait que croître sous l’Empire et la Restauration où ils deviennent très à la mode. Mais le statut des corporations, cloisonnant les professions, freinait l’essor de ces fabrications qui ne nécessitaient pas moins de vingt-cinq états différents: ferblantiers, tôliers, mouleurs, vernisseurs, peintres, doreurs, ciseleurs, etc. La suppression des maîtrises permit d’étendre ces fabrications en leur donnant une nouvelle orientation, allant des objets les plus simple et les plus usuels aux meubles les plus importants.

La manufacture de J F Deharme

Un nouveau venu, J F Deharme, s’établit à Paris en 1792, rue de la Madeleine, où il « travaille à perfectionner ses découvertes (faites) pendant la Révolution ». C’est certainement le meilleur créateur artisan, fondateur de l’importante « Manufacture de tôles et métaux vernis », qu’il installe dans le faubourg Saint Denis, rue Martel, en développant ses ateliers. Cette manufacture subsistera sous différentes raisons sociales, car son fondateur est un piètre commerçant, jusqu’ à la fin de Restauration.

Le gouvernement s’intéresse vivement à ses créations. Un long rapport invite à encourager Deharme, car il imite et surpasse même les Anglais : « Ses produits sont d’un genre nouveau qui honore les arts et il en a porté la perfection à un degré supérieur. ». Le gouvernement tient en effet à aider cette nouvelle industrie, source d’importants débouchés et surtout, ce sera son souci constant, à la voir supplanter l’industrie anglaise, jusqu’alors prépondérante dans ce domaine.

Les mérites de Deharme sont reconnus à l’exposition des « Produits de l’industrie » de 1799 où sa maison figure parmi les douze distinguées par le Jury pour « ses divers ouvrages en tôle vernie, ornés de dessins et peintures d’une grande beauté ».

A l’exposition suivante, en 1801, il obtient une médaille d’or « pour être parvenu à rivaliser avec les Anglais pour les objets de consommation courante et à les surpasser infiniment pour ceux de luxe ». Soutenu par le ministre de l’Intérieur, Deharme obtient des commandes pour le palais des Directeurs, au Luxembourg, pour diverse écoles, pour la décoration des fêtes nationales, enfin pour l’installation des consuls aux Tuileries en 1800.

A titre de secours et d’encouragement, on lui passe commande en mai 1799, ainsi qu’à son associé Dubaux, d’une grande table en tôle peinte pour les Tuileries au prix de 10 113 francs, somme importante à l’époque ; aussi éprouve-t-il des difficultés à se faire payer.

Si la manufacture de la rue Martel demeure seule capable d’entreprendre la fabrication de meubles et d’objets de grande taille en tôle vernie, son fondateur n’en est pas moins aux prises avec de nouvelles et graves difficultés financières.

Une société en commandite, avec MM Dubaux et Rey, est crée en septembre 1802, Deharme restant responsable de la fabrication. Mais à peine deux ans plus tard, malgré des commandes officielles et des encouragements dont un prêt de 100 000 francs, il ne peut éviter la faillite.

Les successeurs de J F Deharme

Ses successeurs, Monteloux-la-Villeneuve, Janvry et Flamard, qui emploient cent quarante ouvriers et artistes, utilisent une arme nouvelle : la publicité.

Ils éditent un catalogue de leurs productions et une notice sur des objets de très grande classe, présentés à l’exposition de 1806, qui leur ont valu une médaille d’or. Leurs prospectus vantent « la beauté et l’élasticité de leurs vernis » et déclarent « que de moyens cet établissement vraiment national n’offre-t-il pas pour les jardins, pour embellir et chauffer les appartements, créer des salles de bains ». Ils diversifient de plus leurs fabrications, perfectionnent une invention aussi ingénieuse qu’utile: des meubles formant coffre-fort mettant les papiers à l’abri du feu et prennent en 1807 un brevet de perfectionnement pour la fabrication d’objets en carton dits « laque français » qui, grâce à un vernis genre Martin, deviennent aussi solides que la tôle. Le procédé prendra un grand essor sous Louis-Philippe et jusque sous le Second Empire.

En 1812, la fabrique passe dans les mains de Tavernier & C°, qui la conservera jusqu’à la Restauration.

Malgré ces changements de direction la fabrique de la rue Martel était restée fidèle à sa spécialité, grâce à l’impulsion donnée par son fondateur Deharme, le grand fournisseur du Garde-meuble impérial, puis royal.

Après son départ, il semble que l’esprit inventif disparaisse peu à peu et, à l’exposition de 1819, Tavernier n’obtient plus qu’une mention honorable pour ses vases vernis très élégamment décorés.

Le retour de Deharme

Deharme lui, rouvre bien vers 1808, sous le nom de sa belle-mère, la veuve Fajard, une nouvelle manufacture de métaux, rue du Faubourg Saint-Denis, où il continue « à faire succès, sur des dessins du meilleur choix, de tous les ouvrages soit de bâtiment, de goût, soit usuels qui peuvent se fabriquer en métaux forgés, fondus, martelés,emboutis, tournés, ciselés, vernissés, décorés en imitation d’agates et pierres précieuses, dorés au vernis d’après les meilleurs et les plus nouveaux procédés… ».

Il est bientôt chargé de travaux pour l’abbaye de Saint-Denis, recommandation qui lui permettra, au retour de Louis XVII, de postuler le titre de « fabricant en bronze du roi » et pour réclamer le règlement de travaux exécutés huit ans auparavant. Bien que son entreprise soit citée jusqu’en 1823, il ne parviendra pas à retrouver son ancienne notoriété, malgré ses talents évidents.

Les autres manufactures sous l’Empire et la Restauration

En dehors de la manufacture de tôle et métaux vernis de la rue Martel et de celle de Deharme, on en relève peu d’autres dans les Almanachs du commerce : cinq en 1812, une dizaine sous la Restauration.

Citons : Hautin, rue Grange-Batelière ; Lehoux, rue du Maine; Jolly, rue des Fossés-Saint-Germain-l’Auxerrois et Boulanger, ex-directeur de la manufacture de la rue Martel, établi dès 1815, 144 rue du Faubourg-Saint-Denis, dont l’entreprise subsistera durant le règne de Louis-Philippe

Ces différentes fabriques se partagent la fabrication de tous ces objets charmants, d’utilisation journalière, dont le décor fait toute la valeur. Leur variété est grande, des plus courants aux plus luxueux : plateaux, seaux, verrières, cafetières, théières, bouilloires à thé, fontaines de salle à manger, mais aussi baignoires et lits de fer, pelles, pincettes, garde-cendres, chenets, flambeaux, bougeoirs, pots à eau, caisses à fleurs, vases, vide-poches, athéniennes, cartels, pendules, tables et guéridons, surtouts de table.

Des objets exceptionnels sous l’Empire

Pour trouver des objets plus exceptionnels, il faut revenir sur les importantes commandes obtenues sous l’Empire par la Manufacture de vernis sur métaux, la seule qui osât tenter de grandes réalisations et s’entourer d’artistes en renom.

Une remarquable table ronde en tôle vernie avec pieds rectangulaires à l’imitation du porphyre est livrée pour 1011 francs, en mai 1801, aux Tuileries. Installée dans le salon de Musique de Joséphine, elle sera envoyée en 1807 au palais de Fontainebleau. D’autres tables, plus simples, en laque français, sont achetées pour les palais impériaux, ce qui montre que ce procédé avait fait son entrée officielle. Pour 850 francs, une table ronde de plus d’un mètre de diamètre, imitant le porphyre antique, soutenue par cinq colonnes également en laque français, est fournie pour le salon de Famille de Saint-Cloud. Une autre table ronde, de 1,92 mètre de diamètre avec un pied triangulaire, orné de griffes patères et lampes antiques, sculpté et doré, à 800 francs, est placée dans le Salon de musique de l’Impératrice aux tuileries ainsi que plusieurs autres guéridons.

Pour obtenir le prêt de 100 000 francs évoqué plus haut, Deharme et Dubaux proposent, en 1804, au Garde meuble des objets en tôle vraiment exceptionnels.

Il s’agit de deux grands vases ornementaux et de deux candélabres, dont les dessins sont de l’architecte François Debret, proposés par Percier, qui les a corrigés. Les motifs égyptiens ont été puisés à la meilleure source : « La Description de l’Egypte » de Denon. Les meilleurs artistes doivent être employés à ces chefs-d’œuvre et un rapport du Conservatoire des arts et métiers se montre fort élogieux à leur sujet.

Un candélabre est de style romain, l’autre égyptien. L’un des vases à la Médicis, le second égyptien.

Ces vases sont en tôle de cuivre avec un bâti en fer, leur monture en bronze doré, leur peinture imitant le jaspe, le porphyre et les pierres fines. Des scènes peintes par Degaut représentent les « Pestiférés de Jaffa » et la « Batailles des pyramides ».

Le devis s’élève à 25 858 francs pour le premier candélabre, à 28 642 francs pour le second, à 32 834 francs pour le vase Médicis et à 34 668 francs pour le vase égyptien. Ces prix sont très élevés mais correspondent à la qualité exceptionnelle et aussi à la très grande taille, 3,10 mètres pour les vases, nécessitant la construction d’un grand four.

Le vase égyptien figure à l’exposition de 1806 et est décrit et reproduit à cette occasion dans l’Athenaeum des Arts. Les exposants reçoivent une médaille d’or. Les vases placés aux Tuileries dans les Grands Appartements, puis dans la galerie de Diane, trop chargés d’emblèmes impériaux subirent d’importants changements sous la Restauration. Ils sont présentés, depuis la monarchie de Juillet, au Louvre.

Le célèbre ensemble de meubles exécutés pour monter les malachites, présents du Tsar Alexandre 1er à l’Empereur et destinés à son grand cabinet des Tuileries, fut aussi complété à la suite d’une commande du Garde-Meuble, par quatre fûts de colonnes en cuivre verni à l’imitation de malachite. Ce modèle, déposé à la manufacture, alors dirigée par Tavernier, devait recevoir les girandoles et les montures fournies et ajustées par Jacob Desmalter, dont les bronzes étaient aussi remarquables que les meubles. Parmi d’autres productions de la célèbre manufacture, citons en premier la magnifique rampe de l’escalier d’honneur du palais de l’Elysée., exécutée pour le grand duc de Berg, « avec une composition métallique, dure, sonore, aussi belle que l’argent le mieux poli » dont quelques parties furent présentées à l’exposition de 1806. Signalons quatre colonnes tronquées, surmontées de vases imitant le porphyre rouge et ornées de bronzes dorés, dans lesquels on peut mette des fleurs ou des girandoles.

Mentionnons encore, en 1812, deux boîtes de pendules en forme de colonnes à l’imitation du marbre, entourées d’un serpent en bronze doré, indiquant les heures, toujours dans les collections nationales.

Le débouché des appareils d’éclairage

La fabrication des appareils d’éclairage constitue le second grand débouché de la tôle peinte et par son importance mérite quelque développement.

Depuis le brevet d’invention pris en 1800 par Carcel pour des lampes dans lesquelles l’huile monte par un mécanisme à pompe dit « lychnomème », c’est la tôle qu’on utilise. En effet, les lampistes, fabricants de lampes, lustres et quinquets, emploient généralement la tôle qui se prête à une grande variété de formes et supporte la chaleur.

Deux grandes maisons se partagent sous l’Empire les commandes officielles : les frères Girard et Duverger. Sous la Restauration apparaissent quelques autres fabriques. Les frères Girard prennent à leur tour deux brevets de perfectionnement pour un nouveau mécanisme applicable aux lampes à double courant d’air, les quinquets en 1803 et pour les lampes hydrostatiques et hydrauliques l’année suivante.

D’ abord établis « au Panorama », puis rue de Richelieu en 1807, les frères Girard reçoivent une médaille d’argent à l’Exposition de 1806. Satisfaits de l’effet des lampes de leur invention remarquées à une fête donnée pour la princesse Murat, l’impératrice Joséphine et l’empereur leur en commandèrent une paire pour un appartement à Fontainebleau. L’inventaire de 1807 les décrit ainsi : deux lampes en forme de vase ovoïde avec leur globe de cristal, décorées de sujets peints par Mallet, représentant l’un « l’arrivée triomphale des chefs-d’œuvre conquis en Italie » et l’autre « les hommages offerts à l’impératrice par l’Agriculture et la Botanique ».

Les socles étaient peints en agate herborisée « de la plus belle imitation » et les ornements en bronze doré. La paire fut achetée 3 500 francs.

Ces fabricants annoncent en 1807 que « leurs produits commencent à se répandre dans toute l’Europe et à devenir un objet important d’exportation ». Ils occupent alors trente ouvriers. Ils n’en sont pas moins obligés de solliciter un prêt du gouvernement qui leur est accordé. Ils inventent alors un nouveau « procédé permettant de décorer mécaniquement la tôle et les autres objets vernis, d’ornements avec des dessins en or et argent ». Ce procédé très économique annonce, hélas, le début d’une industrialisation qui nuira grandement à la qualité des objets.

Duverger, rue Neuve-des-Petits-Champs, se qualifie d’ « illuminateur du palais des Tuileries ». Il est le grand fournisseur de lustres et de quinquets, de lampes à double courant d’air et d’ouvrages en tôle vernie.

D’autres fabriques se fondent sous la Restauration: Chopin, lampiste, rue Saint-Denis,breveté pour ses lampes à demi-parabole ; Lessard, installé passage Basfour, entre la rue Saint Denis et la rue Grenetat, le premier à avoir adapté les lampes à courant d’air aux lustres, à la place des bougies. Marsaux, lui succèdera. Garnier fabrique des lampes à courant d’air de modèles très variés et élégamment décorés ; il en est récompensé par une mention honorable en 1819. Compain, lampiste, fournisseur de la maison du Roi, établi rue de Bourbon, est chargé d’entretenir les lustres à quinquets. A l’avènement de Louis XVIII, il est requis de peindre en « bleu de roi » les lampes des Tuileries et d’en changer les armoiries.

Une qualité en baisse

Mais au fur et à mesure que l’on avance dans le 19ème siècle, la fabrication en série, grâce à l’industrialisation, fait baisser la qualité des objets et leur fait perdre toute originalité comme dans la plupart des branches de l’ameublement. La découverte d’un procédé de décor mécanique constitue l’un des principaux facteurs de cette vulgarisation dont bénéficieront seuls les objets d’utilisation courante qui voient leur prix de revient s’abaisser et dont la vogue continue jusqu’en 1850.

La dernière belle époque des objets en tôle vernie demeure donc le Directoire et le début de l’Empire. Des artisans tel Deharme s’évertuaient alors à donner un nouvel essor à cette branche de l’art décoratif en la diversifiant par de nouvelles applications et en créant de nouveaux modèles. Ils collaboraient avec des artistes en renom, peintres pour décorer les vases et bronziers pour exécuter les montures. En 1806, la manufacture de la rue Martel avait pu diviser ses productions en quatre classes dont nous avons vu des exemples, objets en métal verni et ornés de bronze doré au mat, ceux imitant les plus beaux marbres, ceux plus simple, vernis et dorés, enfin en dernier lieu, ceux « en laque français ». L’imitation était si parfaite que lorsque le pape Pie VII visita la manufacture, le 11 janvier 1805, le Moniteur rapporte qu’il parut étonné de la quantité des ouvrages fabriqués et de la perfection d’imitation des marbres de toutes espèces.

Les objets en tôle, dont beaucoup se sont conservés jusqu’à nous, sont d’une grande variété depuis les plus luxueux, montés en bronze, jusqu’aux plus simples seulement vernis. C’est donc uniquement le décor qui enrichit les œuvres jusqu’à en faire un objet d’art, grâce aux artisans artistes créant selon leur personnalité propre des œuvres où leur esprit d’invention donne à ces réalisations tout leur charme et toute leur valeur artistique avec une perfection technique rarement atteinte depuis.

________________

Mots-clés: ,

1 -Introduction

yves Publié le 24 mai 2007 Mis à jour le 5 avril 2009

__________

Un domaine peu exploré

Lady Florence Walston écrivait dans deux articles, parus en novembre 1925 et en avril 1931 dans la revue anglaise « The Connoisseur » :

Bien qu’il y ait peu de domaines inexplorés dans l’art, il arrive d’en rencontrer qui, pour une raison ou une autre, ont échappé à l’attention du public.

Tel est le cas, j’ai quelques raisons de le penser, de ce qu’en France on nomme « tôle peinte ».

Il existe cependant des collectionneurs avertis en Angleterre et de l’autre côté de la Manche, si bien que le sujet n’est pas totalement inconnu.

En revanche, à ma connaissance, il n’existe pas d’ouvrages abordant ce sujet, à part quelques références éparses dans des livres ou des articles dont la plupart ne le font qu’ indirectement. Ce n’est pas une tâche facile que de trouver une documentation substantielle

Terminologie

Sans doute est-il utile de donner un bref aperçu de la terminologie utilisée dans ce domaine, surtout pour qui souhaite consulter des ouvrages étrangers.

Le terme de « tôle peinte », utilisé de façon courante de nos jours par les antiquaires et les collectionneurs tant français qu’anglais, apparaît pour la 1ère fois, d’après lady Walston, dans le catalogue de l’ Exposition Universelle Interalliée de 1900 à Paris.

Il est utilisé pour désigner indifféremment des objets en fer-blanc, en cuivre, en étain (« tin » en anglais) ou en alliage de plomb et d’étain (« pewter » en anglais). Le terme « tin » désigne aussi bien l’étain pur que l’alliage.

Ce qui est connu en Angleterre sous le nom de « tin » est appelé « blik » en Hollande.

L’encyclopédie Larousse définit le fer-blanc comme une fine tôle de fer doux recouverte d’une mince couche d’étain.

On désigne par un laque (nom masculin) tout objet laqué à partir de la laque (nom féminin), définie par le Larousse comme « la résine naturelle, d’un brun rouge, qui sort des branches de plusieurs arbres de l’Inde et du Tonkin». La documentation évoque ainsi les beaux laques fabriqués par tel ou tel artisan laqueur.

Le terme de « laques hollandaises » est parfois utilisé.

On parle bien sûr aussi des vernis utilisés par les vernisseurs.

L’anglais utilise les deux termes « lacquer » ou « varnish » pour désigner le vernis.

Henri-René d’Allemagne (cf Bibliographie) propose de faire enter dans la catégorie des tôles vernies le décor sur métal appelé « moiré métallique ».

Il convient également de citer les petits objets en tôle émaillée  dont l’Angletterre s’est fait une spécialité dans la seconde moitié du 18ème siècle.

Ces objets sont systématiquement qualifiés d’ « émaux de Battersea », en raison du prestige de cette manufacture à la production éphémère. Les émaux du Staffordshire du Sud sont les plus fameux après ceux de Battersea, en particulier ceux de Bilston et Wednesbury.

 

Ils s’ornent de scènes galantes et champêtres, ruines antiques, fleurs, oiseaux et animaux divers, tirés d’ouvrages illustrés. Ils sont peints à la main ou imprimés par transfert. Les fonds chatoyants évoquent la porcelaine de Chelsea, elle-même influencée par Sèvres. Les roses, dérivés de l’or, sont coûteux et délicats à obtenir.La circulation rapide des dessins et motifs rend difficile la détermination de l’origine et la datation des pièces.

 

L’encyclopédie Britannica et le site du musée de Pontypool (www.pontypoolmuseum.org.uk), proposent les définitions suivantes :

 

tinplate: Désigne les feuilles de tôle étamée ou fer-blanc.

tinware: Objets décoratifs et utilitaires fabriqués à partir de « tinplate ».

 

 

toleware: Tous objets vernis fabriqués à partir de feuilles d’étain, d’alliage ou de fer-blanc.Ce terme dérive évidemment du français « tôle peinte ».Lorsque ces objets sont peints ou vernis, on parle de « painted toleware » ou « tin painted ».

japanning : En arts décoratifs, ce mot anglais désigne le procédé, en vogue en Europe au 18ème siècle, utilisé pour la finition et la décoration du bois, du cuir et du métal, à l’imitation des célèbres laques du Japon.

 

Les objets ainsi traités sont dits « japanned » et les anglais parlent parfois de «japanned tin goods ».

Il n’existe pas de terme équivalent en français, le verbe « japonner » étant réservé, si l’on en croit le Larousse, à la porcelaine et consistant « à lui donner une nouvelle cuisson afin de lui procurer l’apparence de la porcelaine du Japon ».

Osera-t-on, par analogie, inventer le verbe « japonniser » et son substantif, la « japonnisation » ?

Mots-clés: ,

8 - La cote des objets

yves Publié le 24 mai 2007 Mis à jour le 6 mars 2008

8 La cote des objets

 

TPW08

____

 

A l’exception des plateaux, assez courants, les objets en tôle peinte sont, de nos jours, assez peu fréquents sur le marché de l’art, aussi bien en salle de vente aux enchères que chez les antiquaires et brocanteurs.

 

Plusieurs raisons expliquent ce constat. D’abord, la tôle peinte étant sujette à la rouille dès les premières écaillures alors même qu’on l’a souvent utilisée pour des objets d’usage quotidien, rares sont les pièces qui nous soient parvenues en état satisfaisant et surtout sans avoir subi de restaurations intempestives, au moins pour les plus anciennes.. Ensuite, les amateurs et les collectionneurs avertis, jaloux des spécimens qu’ils détiennent ne s’en dessaisissent qu’à contre cœur. Enfin, à la fin du 18ème et au début du 19ème siècle, la production de telles pièces ne fut pas très abondante du fait notamment des difficultés économiques rencontrées par les manufactures (voir § 3.1.2).

 

Le vieil adage : ce qui est rare est cher, s’applique ici  et les cotes observées surprennent souvent les non initiés, surtout s’agissant d’objets fabriqués dans un matériau aussi peu noble a priori que la tôle!

 

Les critères de prix sont naturellement les mêmes que pour les autres objets d’art : époque, état de conservation, présence de restaurations, élégance de la forme, de la couleur et des décors, rareté, ….  

 

On se bornera dans ce qui suit à relever quelques prix ou fourchettes de prix (actualisés si besoin), pour la période allant du Directoire à la Restauration.

 

Objets de décoration

 

Cache pot

600 à 900 € ; 2000 à 3500 € en paire.

Vase Médicis

1300 à 1600 €.

Vasque de forme navette sur piédouche (cf  § 4.1  n° 06)

8000 €, époque Empire ; Marché Serpette ; Puces de Saint Ouen,  2008.

 

Objets utilitaires

 

Arts de la table

 

Cafetière   (cf §4.2  n°16)

#4500 €, époque retour d’Egypte ; Marché Biron; Puces de Saint Ouen,  1999.

Cabaret à liqueur

250 à 350 €, sans la verrerie.

Corbeille à pain  (cf §4.2  n°09)

#500 €, époque Restauration ; Salon des Antiquaires, Porte Maillot, 2002.

Huilier vinaigrier

#1500 € avec ses flacons, époque  Directoire ; Amsterdam, 2007.

Oeufrier  

#750 €, frais inclus ; époque Restauration ; vente Drouot 2006.

Panier à bouteille

1800 €, époque Directoire ; Marché de la gare, L’Isle sur la Sorgue, 2008.

Samovar  (cf §4 .2  n° 15)                              

#2500 €, époque Restauration ; vente Drouot 2000.

Soupière  (cf §4 .2  n° 10) 

#1100 €, époque néoclassique ; Marché de la gare, 2003.

Verrier

600 à 900€ ; 2000 à 3500 €  en paire.

 

Objets de la vie quotidienne

 

Aiguière   (cf §4 .2  n° 39)

750 €, époque Directoire ; commerce d’art parisien, 2006.

Billet doux  (cf 4 .2 n° 19)

#450 €, époque Directoire ; Marché Serpette, 1999.

Boîte à allumettes  (cf §4 .2  n° 20)

150 €, époque Restauration ; Marché Serpette, 2007

Corbeille à papier  (cf §4 .2  n°22)

#150 €, époque milieu 19ème ; Marché Serpette, 2006.

Encrier  (cf §4 .2  n°24)

#250 €, époque Empire ; Commerce d’art Colmar, 2006.

Ephéméride   (cf §4 .2  n°25)

#500 €, époque Charles X ; Salon des Antiquaires, L’Isle sur la Sorgue, 2002.

 

Etui à cordes   (cf §4 .2  n°26)

#500 €, époque Romantique ; Marché Serpette, 2000.

Etui de rasoir    (cf §4 .2  n°27)

#550 €, époque Directoire ; Marché Serpette, 1990.

Fontaine murale (cf §4.2 n° 28, 29, 30)

500 à 1200 €

Œil de bœuf    (cf §4.2 n° 32)

#950 €, époque Directoire ; Marché Serpette, 1998.

Plateau

450 à 750 € ; certains, qui sont de vrais tableaux, atteignent 2000 €.

 

Lampes et appareils d’éclairage

 

Quinquet d’applique

750 à 1100 €

Suspension Carcel  (cf § 4.3n°43)

#1100 €, Marché Serpette, 2000.

Lustre

1600 à 2500 €

Bougeoir

#250 €, époque Directoire ; Commerce d’art Amsterdam, 2006.

 

Accessoires de mobilier

 

Série de quatre chaises à dossier en tôle peinte    (cf §4.4 n° 61)

#4500 € ; Commerce d’art, Toulouse, 1997.

Table de chevet    (cf §4.4 n° 64)

#500 € ; Marché Serpette, 2000.

 

Enseignes, objets de piété

 

Enseigne de chapelier    (cf 4.5 n° 50)

600 €, époque Directoire ; Marché Serpette, 2000.

 

Enseigne de chapelier    (cf §4.5 n° 51)

750 €, époque Restauration ; Marché Serpette, 2007.

 

Ecusson de chais    (cf §4.5 n° 60)

#350  €, époque fin 18ème ; Commerce d’art, L’Isle sur la Sorgue, 2003.

 

Bouquet d’autel   (cf §4.5 n°59)

750 €, époque Directoire ; Commerce d’art, L’Isle sur la Sorgue, 2005.

 

Enseigne de procession (cf §4.5 n° 56)

#350 €, époque fin 18ème ; Commerce d’art, L’Isle sur la Sorgue, 2005.

 

 

Mots-clés: ,

6.3 *Procédé d’impression et application de gravures

yves Publié le 24 mai 2007 Mis à jour le 29 août 2009

Le procédé d’impression

 

On a utilisé pour la décoration des objets en tôle vernissée le même procédé d’impression que celui utilisé pour décorer les faïences fines, notamment par les manufactures de Creil, de Montereau et de Choisy- le- Roi. Le procédé  d’impression, découvert en Angleterre au milieu du 18ème siècle, était arrivé en France après bien des péripéties.

 

Au début du 19ème siècle, le plus connu des « facteurs d’impression » spécialisés dans la pose de décors imprimés est Antoine Legros d’Anizy. Associé à John Hurford Stone, un Anglais, et à Athanase Marie-Martin Coquerel, il obtient un brevet en 1808.

Installés tous trois rue du Cadran à Paris, ils appliquent, par un procédé de décalcomanie, des décors de gravures sur des faïences fines mais également sur bien d’autres supports tels que la tôle ou le carton bouilli.

De 1808 à 1818, ils sont associés au sein d’une « manufacture de décor sur porcelaines» qui exploite le procédé d’impression, protégé par brevet, qu’ils détiennent, Les fabriques de faïences leur envoient leurs pièces pour être décorées. Les manufactures de tôle peinte font de même.

 

Les décors imprimés en noir sur fond de couleur reprennent, le plus souvent, des scènes tirées de la mythologie, de l’histoire et de la littérature. La commande du décor est faite à la demande parmi une très riche variété de gravures comme l’énumère un supplément de l’Almanach du commerce de 1808: « les sujets des fables de La Fontaine , les portraits des grands hommes, anciens ou modernes, les vues pittoresques, châteaux et maisons de campagne de différents pays, les principaux traits de l’histoire de France et de l’histoire romaine, les cartes géographiques de chaque département de l’Empire français, les monuments de Paris et de ses environs, les pierres gravées, les attributs maçonniques …, le tout d’après les dessins des meilleurs artistes ».

 

On conçoit que le procédé ait été plus aisé à appliquer sur des pièces plates que sur des objets de forme : il se rencontre donc, la plupart du temps, sur des plateaux, des porte mouchettes, des vide-poches…

 

Le lecteur trouvera ci-dessous la transcription des brevets déposés en leur temps par Legros d’Anisy, Stone et Coquerel, dont la copie (cotes 205-425 à 205-433) nous a été aimablement fournie par le conservateur du musée Gallé-Juillet à Creil. On a voulu conserver l’orthographe de l’époque, parfois approximative.

 

Brevet de dix ans délivré le 26 février 1808

 

Procédé de la manufacture d’impressions de toutes sortes de dessins et gravures sur fayence, terre de pipe, porcelaine, cristaux, tôle, bois vernissé, or, argent, écaille, yvoire, toille, et autres objects pouvant ou non supporter la cilindre par leur forme ou leur nature et appartenant, style=”mso-spacerun: yes”>  la dite manufacture et procédé, en société, à Antoine Legros d’Anisy, peintre sur porcelaine, attaché à la manufacture impériale et royale de Sèvres, pour la transmission des gravures, blasons et chiffres sur toutes les porcelaines destinées au service des Palais impériaux ; Jean Hurford Stone et Marie-Martin Athanase Coquerel, tous deux anciens propriétaires fondateurs de la manufacture de fayence blanche et cristaux, établie à Creil sur Oise, domiciliés à Paris.

La dite manufacture, établie à Paris, rue du Cadran, ci-devant  Du Bout du Monde, n°17 et 19, sous la raison Manufacture d’impression sur fayence, porcelaine, etc, etc, à Paris, avec la marque sur toutes les pièces à fabriquer des trois lettres   L S C .

 

Le procédé se divise en cinq opérations principales qui sont : la mixtion, la préparation du papier, la couleur, l’application et la cuisson.

 

 

La mixtion se compose d’une partie de gomme arabique, de résine et de thérébentine en suffisante quantité. Ces trois matières combinées et cuites s’appliquent sur l’émail ou autres objets qu’on veut imprimer en imbibant un linge et frottant sur la pièce que l’on fait ensuite sécher soit au feu soit à l’air.

 

Préparation du papier

 

L’eau pour la préparation du papier se compose avec du fiel de carpe  (1) et de la potasse, mêlés en quantité suffisante, et filtrée.

Cette eau sert à tremper le papier sur lequel on imprime ensuite.

 

La couleur dont on se sert pour remplir la taille des planches se compose pour le noir de sulfate de manganèse passé à l’état de carbonate, de sulfate de cuivre en cristaux de Vénus (2) cristallisé et grillé puis passé à l’état de carbonate plus du cobalt de Suède.

 

 

On tire l’épreuve sur du papier à filtre dit Joseph (3) que l’on a trempé dans l’eau préparée comme dit ci-dessus et laissé s’essuyer. Le tirage à la manière ordinaire. Ensuite on jette l’épreuve à la surface de cette même eau et on la relève un quart d’heure après en la mettant ressuyer de nouveau sur du papier non collé et on l’applique sur la pièce mixtionnée ; puis avec un petit tampon de papier Joseph imbibé de cette même eau, on appuie sur l’épreuve jusqu’à parfaite impression.

 

Cuisson

La cuisson s’effectue sur des moufles comme pour la porcelaine jusqu’à ce que l’impression soit passée sous l’émail.

 

Résultats

 

Les résultats qu’obtiennent les dits sieurs Legros Stone et Coquerel par leur procédé est d’offrir au public des fayences , porcelaines et autres objets aussi bien imprimés que sur le plus beau papier avec l’avantage de donner aux émaux plus de dureté et de solidité par une nouvelle cuisson, notamment sur la fayence dite terre de pipe dont l’émail fabriqué en France est très tendre.

 

 

Paris ce dix janvier 1808

Legros Stone Coquerel

 

 

Certificat d’addition, délivré le 30 octobre 1809, au précédent brevet

 

A son Excellence le Ministre de l’Intérieur,

 

Monseigneur,

 

Les soussignés propriétaires de la manufacture d’impression sur faïences, porcelaines et autres objets, établie à Paris rue du Cadran n°9, vu les procédés dont ils sont inventeurs aux termes des Brevets d’invention et de perfectionnement à eux accordés le 26 février de l’année dernière, prient votre Excellence de vouloir bien solliciter auprès de sa Majesté Impériale et Royale,  pour eux, un second brevet additionnel de changement et de perfectionnement conformément aux procédés ci-après énoncés.

 

Les procédés se composent toujours des opérations principales qui sont : 1° la mixtion, 2° l’au pour tremper le papier avant ou après l’impression, 3°le papier, 4°la manière de transmettre ou de décalquer l’épreuve sur la pièce mixtionnée qu’on veut imprimer à l’aide de tampons de papier ou de linge, 5° la cuisson.

 

Le perfectionnement trouvé pour la mixtion est qu’ils se servent tout simplement de vernis gras dit vernis copale qu’on étend soit avec l’essence de thérébentine ou avec l’esprit de vin (4). Il entre encore dans ce perfectionnement de ne pas ses servir du tout de mixtion, particulièrement pour l’impression sur verre, glacette, où sa teinte nuit à la transparence ; on y supplée en faisant chauffer la pièce que l’on veut imprimer et en mouillant la gravure plusieurs fois pour la faire décalquer.

 

Il entre encore dans les nouveaux moyens d’opérer de se servir de cire dont on frotte la pièce, ce qui sert de mixtion. Enfin toutes les cires, dissoutes par leurs dissolvants connus, peuvent aussi en servir.

Les colles de Flandre (5) et autres, en les dissolvant de même manière, ont aussi les mêmes propriétés. Les inventeurs ont aussi reconnu que l’eau, pour tremper leur papier avant ou après impression, pourrait remplacer celle où ils mettaient de la potasse et du fiel de carpe. Quant au papier, soit pâte Joseph ou vélin, donne toujours les décalques les plus faciles et les plus parfaits pour la transmission des gravures sur les pièces mixtionnées. On emploie pour remplacer les tampons un instrument appelé roulette qui accélère de plus de moitié le décalque. Cette roulette se recouvre de lanières de peau, de linge ou d’étoffe quelconque. On y adapte un manche et on la roule légèrement et en tous sens sur le revers de l’épreuve préalablement posée sur le papier qu’on veut imprimer. Son action accélère et perfectionne considérablement l’opération ; ainsi qu’on l’a dit elle remplace avantageusement le tampon dont on servait dans les premiers travaux, tellement même qu’une femme avec la roulette peut facilement imprimer 200 ou 250 assiettes par jour.

 

Il est encore un autre instrument dont se servent les inventeurs pour de certaines pièces telles que plats, assiettes etc. C’est une espèce de contre moule dont le dessous est recouvert en étoffe comme les dites roulettes. C’est un rond de bois. Cet espèce de contre moule et la pièce sur laquelle est l’épreuve pour être décalquée, se passe sous une presse à vis ou à caractère ; par une légère pression réitérée, l’épreuve se trouve transportée sur la pièce.

Par le moyen de cet espèce de contre moule, trois personnes impriment aisément 900 à 1000 pièces par jour. Les inventeurs ont dit aussi, dans la description de leur cuisson, qu’ils se servent de moufles à l’instar de la porcelaine mais ils ont atteint un perfectionnement dont voici la description.

 

Non seulement ils ont inventé une espèce de machine pour supporter les assiettes en terre de pipe, plats et autres pièces qui, si elles se touchaient à la cuisson, se colleraient ensemble l’émail entrant en fusion, et ont donné à ces sortes de machines le nom de crémaillères parce qu’elles en ont presque la forme, mais encore ils ont perfectionné les moufles pour la cuisson de leurs terre de pipe, faïences, porcelaines etc.

Les crémaillères sont des bandes de fer plates et crénelées en forme de scie ; il s’en élève trois qui forment un triangle, chaque cran recevant une assiette ou autre pièce. Ces crémaillères remplacent ce dont on se sert dans les manufactures ordinaires et portant beaucoup plus de marchandises, les dents étant très rapprochées, on les enduit de blanc d’Espagne pour garantir les marchandises de l’oxyde de fer, les caisses qui les contiennent étant aussi en fer.

 

Les inventeurs ont imaginé de faire leur four ou moufle en longueur et de pratiquer des plaques qui s’élèvent à volonté et séparent chaque caisse qui sont sur des traîneaux qu’un treuil fait mouvoir, ce qui les faisant succéder les unes aux autres dans le foyer principal suffisamment chauffé, offre l’avantage de cuire avec beaucoup moins de bois vingt six moufles par jour au lieu de quatre ou cinq, parce qu’il faudrait laisser refroidir le moufle pour la défournage.

    

Coquerel

  Par moi et mes associés

 

Paris 26 septembre 1809

 

Demande de brevet de perfectionnement du 27 février 1818

 

Description de tous les moyens employés et à employer par le Sr Legros d’Anisy, inventeur des procédés d’impression de toutes espèces d’épreuves tirées en toutes couleurs même en or argent, platine , papier, à l’aide de planches de cuivre ou pierre lithographique et transportées sur faïence émaillée ou non, pierre lithographique pour en perpétuer les épreuves à l’infini, verres à vitre, cristaux, bois, tôle moirée métallique vernissée ou non, carton laque, ivoire, or, argent, fer, acier, ou tout autre matière pouvant supporter l’action de la presse.

 

Perfectionnement des procédés qui ont mérités à l’auteur un brevet d’invention pour les objets ci-dessus décrits.

 

1er Moyen du brevet accordé le 26 février 1808

 

Il fallait une mixtion composée de résine, de gomme etc.

Perfectionnement: il suffit de vernis gras du commerce étendu dans la proportion d’un litre sur trois d’essence de thérébentine.

 

2ème  Moyen du 1er brevet

 

Le papier exigeait d’être fabriqué de pâte particulière.

Perfectionnement : il suffit que le papier soit sans colle aucune.

 

3ème  Moyen du 1er brevet

 

L’encre de couleur noire se composait de sulfate de manganèse, de sulfate de cuivre, d’oxide de cuivre, de fondant de plomb composé de sable et de minium.

 

Perfectionnement : manganèse en mamelon peu connu dans le commerce ; ce manganèse se tire de la Bourgogne ; la modicité du prix de cette couleur noire peut donner la faculté de livrer au commerce des objets imprimés à un prix plus modéré.

 

4ème Moyen du 1er brevet

 

Il fallait des planches gravées sur cuivre.

 

Principal perfectionnement : depuis la découverte de la pierre lithographique, l’inventeur a remplacé les cuivres par les gravures faites sur pierres lithographiques. Il a ajouté à ce perfectionnement l’invention de transmettre toute espèce de gravure ou épreuve tirée d’un cuivre sur une pierre lithographique, et par ce transport de tirer avec cette pierre des épreuves aussi belles que celles provenant de la gravure sur cuivre et se transportant ensuite, tirées sur papier, avec la même facilité que les épreuves provenant de celles tirées sur cuivre, et se reportant de même sur faïence, porcelaine, etc.

 

Afin de constater la véracité de cette découverte utile aux arts, hors même le transport sur porcelaine, faïence et tous les objets désignés dans la demande de perfectionnement, je joins une des épreuves tirées que m’adressa à ce sujet Mr Engelmann (6), sous la date du 17 novembre 1817, après la lui avoir transportée sur pierre lithographique(qu’il m’avait envoyée), cette même épreuve provenant de cuivre gravé du plus grand fini ; l’avantage de cette découverte est qu’une planche gravée sur cuivre devient une espèce de matrice, car chaque épreuve par ce moyen offre une planche nouvelle et neuve.

 

Moyen de transmettre une épreuve provenant d’un cuivre gravé sur la pierre lithographique :

 

Il consiste à tirer son épreuve comme on le fait en taille douce et avec le même noir(dit végétal) ; on la pose avec soin sur la dite pierre et à l’aide d’une roulette, ainsi que l’on transporte les épreuves sur faïence, on la décalque sur la pierre en promenant et appuyant également la roulette sur l’épreuve jusqu’à ce qu’elle soit entièrement passée sur la pierre ; il est nécessaire que la pierre soit un peu chaude ; pour cela, on la met dans une étuve ; il ne faut pourtant pas qu’elle le soit trop ; pour atteindre l’état voulu, il faut que la joue la supporte longtemps sans qu’elle la chauffe trop. Le corps gras de l’huile qui est la base de l’encre ou le crayon lithographique s’incorpore aussitôt dans la pierre autant qu’il y a de superficie de couleur sur l’épreuve, ce qui donne la finesse et le fort de la taille du point de lavis ou de crayon, enfin du genre de gravure que vous transportez…

 

Ce vingt sept février mil huit cent dix huit

 

Legros d’Anisy

 

 

NDLR

(1) Le  fiel de carpe (bile) est connu depuis le moyen âge comme un pigment donnant la couleur jaune.

 

(2) Au 18ème siècle, on désignait sous le vocable de « Cristaux de Venus » l’acétate de cuivre cristallisé.

 

(3)  Le « papier joseph » a été crée par Joseph de Mongolfier qui l’utilisait pour effectuer des filtrages très purs.

 

(4) L’ « esprit de vin » désigne au 18ème siècle l’éthanol ou alcool éthylique obtenu par distillation du vin ou d’une boisson fermentée.

 

(5) L’Encyclopédie méthodique, publiée en 1805 par Panckouke-Agasse, cite la colle de Flandre, au même titre que la colle de poisson, comme exemple de colle faite avec les parties délicates des jeunes  animaux ou avec des membranes minces et molles ; cette colle est réputée plus blanche, plus dissoluble, moins visqueuse ; elle jouit d’une grande transparence.

 

(6) Godefroy Engelmann (1788-1839), né et mort à Mulhouse, est l’introducteur de la lithographie en France. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages sur cette technique dont un « Traité théorique et pratique de la lithographie ».

 

 

 

 

L’application de gravures

 

On rencontre parfois des objets en tôle peinte dont la décoration est réalisée par le simple collage sur la tôle d’une gravure tirée sur papier en noir, en grisaille ou en couleur puis vernie.

 

Il semble que l’utilisation de cette technique, plus rudimentaire, soit apparue à la fin de la 1ère moitié du 19ème siècle.

 

________________________________________________________________________________________________________________

 

Voici quelques exemples d’objets utilisant le procédé d’impression et l’application de gravures :

 

 

 

Plateau tôle peinte orange.jpg

 

35 Plateau en tôle peinte orange, de forme ovale, orné par impression en noir d’un médaillon central et de dix médaillons sur le pourtour, scènes allégoriques, à l’antique, figurant les arts et l’agriculture, frise végétale sur le rebord. Epoque Empire. Coll Cazenave

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Porte mouchettes n ° 2.jpg

Porte mouchettes

 

 

41 Porte mouchettes en forme d’hexagone étiré, en tôle peinte ocre, filet noir en bordure, orné d’une scène antiquisante : couple dans un paysage exposé aux traits d’Eros. Epoque – début 19ème. Coll Cazenave

 

 

 

 

 

 

 

 

 

P1000176.JPG

Paire de vide poches

 

65 Paire de vide-poches en tôle peinte verte, de forme ovale, à décor par impression de scènes de bataille napoléoniennes, bordure ajourée argentée. Epoque Empire.

Coll Cazenave

 

 

 

 

 

 

 

 

Corbeille à papier Coll Cazenave.JPG

Corbeille à papier

 

 

22 Corbeille à papier en tôle peintre ocre, à décor d’une gravure coloriée collée sur la tôle, représentant un personnage en robe à col de fourrure, Inscriptions sous la gravure : « David Teniers pinxit », « Chéry », « Gandolfi sculp ». Travail anglais. Coll Cazenave.

 

 

 

 

 

 

 

 

P1000178.JPG

Jardinière

 

 

66Jardinière en tôle peinte jaune, de forme ovale, à deux anses, intérieur bleu pâle, décorée de quatre gravures en grisaille représentant les déboires et défaites de Napoléon : « Napoléon at Waterloo », « Napoléon at Montereau », « Napoléon Retreat from Russia », « Adieu at Fontainebleau ». Travail anglais. Epoque 19ème. Coll Cazenave

 

Mots-clés: ,

Next »